Dimitrov
L'Incendie
du Reichstag, discours
final devant le tribunal, d嶰embre 1933
Dimitrov.
- En vertu du paragraphe 258 du code de procédure
criminelle, j'ai le droit de parler comme défenseur et comme
accusé.
Le
président. - Vous avez le droit de parler le dernier. Cela
vous est accordé maintenant.
Dimitrov.
- En vertu de ce code, j'ai le droit de discuter avec le ministère
public et, ensuite, de faire une dernière déclaration.
Messieurs
les juges, messieurs les accusateurs, messieurs les défenseurs,
déjà, au début du procès, il y a trois
mois de cela, j'ai adressé, en tant que prévenu, une
lettre au président du tribunal. J'y exprimais mon regret de
ce que mes interventions aient abouti à des conflits avec les
juges. Mais je protestais résolument contre l'interprétation
de ma conduite comme un abus prémédité de mon
droit de poser des questions et de faire des déclarations aux
fins de propagande. On conçoit qu'étant accusé
bien qu'innocent, je cherche à me défendre contre de
fausses accusations par tous les moyens dont je dispose.
Je
reconnais, écrivais-je, que certaines questions n'ont
pas été posées par moi de façon aussi
juste du point de vue de l'opportunité et de la formulation
que je l'aurais voulu. Mais cela ne s'explique que par mon ignorance
du droit allemand. En outre, je suis pour la première fois de
ma vie impliqué dans un pareil procès judiciaire. Si
j'avais eu un défenseur de mon choix, j'aurais certainement pu
éviter des incidents aussi fâcheux pour ma propre
défense. J'avais nommé plusieurs avocats, Detchev,
Moro-Giafferi, Campinchi, Torrès, Grigorov, Léo
Gallagher (Amérique) et le docteur Lehmann (de Sarrebrück).
Mais le tribunal d'Empire a repoussé sous divers
prétextes,
toutes mes propositions, les unes après les autres. Ce n'est
pas que je nourrisse une méfiance personnelle à l'égard
de M. le docteur Teichert, ni comme homme, ni comme avocat. Mais,
dans l'état actuel des choses en Allemagne, je ne puis nourrir
la confiance nécessaire envers Teichert dans son rôle de
défenseur officiel. C'est pourquoi je m'efforce de me défendre
moi-même, et il est évident qu'il m'arrive de commettre
des irrégularités au point de vue juridique.
Dans
l'intérêt de ma défense devant le tribunal, et
aussi, comme je le crois, dans celui de la marche normale du procès,
je m'adresse encore une fois - la dernière - à la
Cour suprême, pour lui demander d'autoriser l'avocat Marcel
Willard, à qui ma s線r a donné aujourd'hui pleins
pouvoirs, à prendre part à ma défense. Si cette
dernière proposition devait être, elle aussi, repoussée,
il ne me resterait qu'à me défendre moi-même du
mieux que je pourrai.
Cette
proposition ayant été rejetée, j'ai décidé
d'assumer moi-même ma défense. N'ayant besoin ni du
miel, ni du venin de l'éloquence du défenseur qui m'a
été imposé, je me suis défendu seul au
long de ces débats.
Il
est tout à fait clair que je ne me sens lié en aucune
façon par la plaidoirie du docteur Teichert. Ce qui compte
seul pour ma défense, c'est ce que j'ai déclaré
jusqu'ici moi-même devant le tribunal, et ce que je vais
déclarer tout de suite. Je ne voudrais pas offenser mon
camarade de parti, Torgler - à mon avis, son défenseur
l'a déjà bien assez malmené - mais je dois le
dire explicitement : je préfère être condamné
à mort, innocent, par le tribunal allemand qu'obtenir mon
acquittement par une défense comme celle du docteur Sack au
profit de Torgler.
Le
président (interrompant Dimitrov). - Il ne vous
appartient pas de faire des critiques de cette nature.
Dimitrov.
- J'admets que je parle un langage rude et vif, mais ma lutte et ma
vie l'ont été également.
Cependant,
mon langage est sincère et franc. Je cherche à appeler
les choses par leur nom. Je ne suis pas un avocat qui a l'obligation
de défendre ici son client.
Je
me défends moi-même comme un communiste accusé.
Je
défends mon honneur politique, mon honneur de révolutionnaire.
Je
défends mes idées, mes convictions communistes.
Je
défends le sens et le contenu de ma vie.
Aussi
bien chaque parole prononcée par moi devant le tribunal,
c'est, pour ainsi dire, le sang de mon sang et la chair de ma
chair. Chaque parole est l'expression de ma plus profonde
indignation contre l'accusation injuste, contre le fait qu'un pareil
crime anticommuniste soit attribué aux communistes.
On
m'a souvent reproché de ne pas prendre au sérieux la
Cour suprême allemande. C'est absolument injustifié.
Il
est vrai que pour moi, communiste, la loi suprême est le
programme de l'Internationale communiste, la Cour suprême la
Commission de contrôle de l'Internationale communiste.
Mais
pour moi, comme accusé, le tribunal suprême est une
instance qu'il convient de considérer avec le maximum de
sérieux, non seulement parce qu'il est composé de juges
d'une haute qualification juridique, mais encore parce que ce
tribunal est l'organisme juridique le plus important de l'Etat
allemand, de l'ordre social régnant, instance qui peut en
définitive condamner à la peine capitale. Je puis, la
conscience tranquille, déclarer que, devant le tribunal et,
par conséquent, aussi devant l'opinion publique, je n'ai dit
que la vérité sur toutes choses. En ce qui concerne mon
Parti, qui est réduit à l'illégalité,
j'ai refusé d'apporter aucun témoignage quel qu'il
soit. J'ai toujours parlé avec sérieux, avec ma
conviction la plus profonde.
Le
président. - Je ne tolérerai pas qu'ici, dans cette
salle, vous vous adonniez à la propagande communiste. Vous
l'avez fait tout le temps. Si vous continuez dans ce sens, je vous
retirerai la parole.
Dimitrov.
- Je dois protester résolument contre l'affirmation que j'ai
poursuivi des fins de propagande. On peut estimer que ma défense
devant le tribunal a eu une certaine action de propagande. J'admets
aussi que ma conduite devant le tribunal puisse servir d'exemple à
tout accusé communiste, mais ce n'était pas là
le but de ma défense. Mon but consistait à réfuter
l'accusation visant à faire croire que Dimitrov, Torgler,
Popov et Tanev, le Parti communiste allemand et l'Internationale
communiste ont un rapport quelconque avec l'incendie.
Je
sais que personne en Bulgarie ne croit à notre prétendue
complicité dans l'incendie du Reichstag. Je sais
qu'à
l'étranger, en général, il est peu probable
qu'il se trouve des gens pour le croire. Mais en Allemagne les
conditions sont différentes : ici on peut ajouter foi à
ces étranges affirmations. C'est pourquoi j'ai voulu prouver
que le Parti communiste n'a eu et n'a rien de commun avec la
participation à ce crime.
Si
l'on parle de propagande, bien des interventions, ici, ont revêtu
ce caractère. Les discours de Goebbels et de Goering ont
également exercé une propagande indirecte en faveur du
communisme, mais personne ne peut les rendre responsables de ce que
leurs interventions ont eu un tel effet de propagande (mouvement
et rires dans la salle).
Non
seulement la presse m'a diffamé de toutes les manières,
- ce qui m'est totalement indifférent, - mais à
travers moi on a qualifié le peuple bulgare de « sauvage
» et de « barbare » ; on m'a qualifié d' «
individu balkanique suspect », de « sauvage Bulgare »,
et je ne saurais passer cela sous silence.
Il
est vrai que le fascisme bulgare est sauvage et barbare. Mais
la classe ouvrière et la paysannerie de Bulgarie, les
intellectuels du peuple bulgare ne sont ni des barbares ni des
sauvages. Le niveau des conditions matérielles dans les
Balkans est certainement moins élevé que dans les
autres pays d'Europe; mais, au point de vue intellectuel et
politique, il est faux de dire que nos masses populaires sont à
un niveau inférieur à celui des masses des autres pays
européens. Notre lutte politique, nos aspirations politiques
en Bulgarie ne sont pas inférieures à celles des autres
pays. Un peuple qui pendant cinq cents ans a vécu sous le joug
étranger sans perdre sa langue et sa nationalité, un
peuple d'ouvriers et de paysans qui a lutté et continue à
lutter contre le fascisme bulgare, n'est ni barbare, ni sauvage. Les
barbares et les sauvages en Bulgarie, ce sont uniquement les
fascistes.
Mais
je vous le demande, monsieur le président, dans quel pays
les fascistes ne sont-ils ni des barbares, ni des sauvages ?
Le
président (interrompant Dimitrov). - Ne faites-vous
pas allusion à la situation en Allemagne ?
Dimitrov
(avec un sourire ironique). - Evidemment non, monsieur le
Président...
A
l'époque où l'empereur d'Allemagne Charles-Quint disait
qu'il ne parlait l'allemand qu'à son cheval, et où les
nobles allemands et les hommes instruits n'écrivaient que le
latin et avaient honte de la langue maternelle, dans la «
barbare » Bulgarie, Cyrille et Méthode avaient créé
et diffusé l'ancienne écriture bulgare.
Le
peuple bulgare a lutté de toutes ses forces et de toute sa
ténacité contre le joug étranger. Aussi bien je
proteste contre les attaques dont le peuple bulgare est l'objet. Je
n'ai pas à rougir d'être un Bulgare, je suis fier d'être
un fils de la classe ouvrière bulgare.
Avant
d'en venir à la question essentielle, je dois marquer ceci :
le docteur Teichert nous a reproché de nous être
nous-mêmes placés dans la situation d'inculpés de
l'incendie du Reichstag. A cela je dois répondre que, depuis
le 9 mars, jour de notre arrestation, jusqu'au début de ce
procès, il s'est écoulé bien du temps ; pendant
cette période on aurait pu éclaircir tous les points
éveillant des soupçons. Au cours de l'instruction, j'ai
parlé à des fonctionnaires de la commission d'enquête
sur l'incendie du Reichstag; ces fonctionnaires m'ont déclaré
que nous, les Bulgares, ne sommes pas coupables de complicité
dans ce crime. On ne devait que nous imputer d'avoir vécu avec
de faux passeports, sous des noms d'emprunts, sans nous être
faits enregistrer, etc.
Le
président. - Ce dont vous parlez maintenant n'a pas été
débattu au procès; par conséquent, vous n'avez
pas le droit d'en parler ici.
Dimitrov.
- Monsieur le Président, on aurait dû pendant ce temps
vérifier toutes les données pour nous éviter en
temps opportun cette accusation. L'acte d'accusation porte que «
Dimitrov, Popov et Tanev affirment être des émigrés
bulgares. Cependant, on doit tenir pour prouvé qu'ils
séjournaient en Allemagne aux fins d'action politique illégale
». Ils sont, est-il dit dans l'acte d'accusation, «
envoyés par Moscou en Allemagne chargés de préparer
une insurrection armée ».
A
la page 83 de l'acte d'accusation, il est dit : « Bien que
Dimitrov ait déclaré avoir été absent de
Berlin du 25 au 28 février, cela ne change rien, cela ne le
dégage pas, lui, Dimitrov, de l'accusation de participation à
l'incendie du
Reichstag. » Cela ressort, - est-il dit plus loin dans l'acte
d'accusation, - non seulement des dépositions de Hellmer,
d'autres faits témoignent également que...
Le
président. - Vous ne devez pas lire ici tout l'acte
d'accusation, nous le connaissons parfaitement.
Dimitrov.
- Je dois dire que les trois quarts de tout ce qu'ont dit au procès
le procureur et les défenseurs, est depuis longtemps connu de
tout le monde et cependant ils l'ont répété ici
(mouvement et rires dans la salle). Hellmer a témoigné
que Dimitrov et Van der Lübbe se trouvaient au restaurant
Bayernhof. Plus loin je lis dans l'acte d'accusation :
Si
Dimitrov n'a pas été pris sur le lieu du crime, il n'en
a pas moins participé à la préparation de
l'incendie du Reichstag. Il s'était rendu à Munich pour
se ménager un alibi. Les brochures trouvées chez
Dimitrov montrent qu'il participait au mouvement communiste
d'Allemagne.
Telle
est la base de cette accusation hâtive, qui s'est avérée
une fausse-couche.
Le
président (interrompant Dimitrov). - Vous ne devez
pas employer de ces expressions irrespectueuses en parlant de
l'accusation.
Dimitrov.
- Je tâcherai de trouver d'autres expressions.
Le
président. - Mais pas aussi inadmissibles.
Dimitrov.
- Je reviendrai aux méthodes d'accusation et à
l'accusation, à un autre point de vue.
Le
caractère de ce procès avait été
déterminé par cette thèse que l'incendie du
Reichstag est l'線vre du Parti communiste d'Allemagne, de
l'Internationale communiste. Cet acte anticommuniste - l'incendie
du Reichstag - a été attribué aux communistes,
comme devant proclamer le signal de l'insurrection communiste, le
signal du renversement de la Constitution allemande actuelle. A
l'aide de cette thèse on a conféré à tout
le procès un caractère anticommuniste. L'accusation
porte :
L'accusation
s'en tient au point de vue que cet attentat criminel devait servir
d'appel, de signal aux ennemis de l'Etat, qui voulaient déclencher
ensuite l'attaque générale contre l'Etat
allemand
pour l'anéantir sur l'ordre de la IIIe
Internationale et ériger à sa place la dictature du
prolétariat, un Etat soviétique.
Messieurs
les juges ! Ce n'est pas la première fois que semblable
attentat est attribué aux communistes. Je ne peux citer ici
tous les exemples de ce genre. Je rappelle l'attentat sur le chemin
de fer ici, en Allemagne, près de Juterborg, attentat commis
par un aventurier anormal, un provocateur. A ce moment, non seulement
en Allemagne mais aussi dans les autres pays, on a, des semaines
durant, accrédité le bruit que c'était là
l'線vre du Parti communiste allemand, que c'était un acte de
terrorisme des communistes. Plus tard on apprit que cela avait été
fait par le fou, l'aventurier Matuchka. Celui-ci a été
arrêté et condamné.
Et
voici un autre exemple, l'assassinat du président de la
République française par Gorgoulov. Là aussi, on
écrivit dans tous les pays qu'on y voyait la main des
communistes. Gorgoulov était représenté comme un
communiste, un agent soviétique. Qu'elle était la
vérité ? Cet attentat s'est trouvé être
organisé par les gardes blancs, et Gorgoulov s'est avéré
un provocateur qui voulait obtenir la rupture des relations entre
l'Union soviétique et la France.
Je
rappellerai aussi la tentative de faire sauter la cathédrale
de Sofia. Cet attentat n'avait pas été organisé
par le Parti communiste bulgare, mais ce dernier n'en a pas moins été
l'objet de poursuites. Deux mille ouvriers, paysans et intellectuels
furent sauvagement assassinés par les bandes fascistes sous le
prétexte que les communistes avaient fait sauter la
cathédrale. Cette provocation, l'explosion à la
cathédrale de Sofia, avait été organisée
par la police bulgare. Déjà en 1920, le chef de la
police de Sofia, Proutkine, avait organisé pendant la grève
des cheminots des attentats à l'aide de bombes, comme moyen de
provocation contre les ouvriers bulgares.
Le
président (interrompant Dimitrov). - Cela n'a rien à
voir avec ce procès.
Dimitrov.
- Le fonctionnaire de police Heller a parlé ici de la
propagande communiste des incendies, etc. Je lui ai demandé
s'il ne connaissait pas des cas où des incendies,
allumés
par des entrepreneurs pour toucher le montant de l'assurance, avaient
été ensuite imputés aux communistes. Le
Völkischer Beobachter du 5 octobre a écrit que la
police de Stettin...
Le
président. - Cet article n'a pas été présenté
au procès. (Dimitrov tente de continuer.)
Le
président. - Je vous interdis d'en parler ici, du moment que
ce fait n'a pas été mentionné au procès.
Dimitrov.
- Toute une série d'incendies...
Le
président interrompt de nouveau Dimitrov.
Dimitrov.
- On en a parlé à l'instruction, parce que toute une
série d'incendies ont été imputés aux
communistes. Par la suite, il s'est avéré que les
propriétaires des immeubles les avaient allumés «
pour donner du travail ! ». Je voudrais également
traiter un instant de la question des faux documents. Il existe un
grand nombre de faux qui ont été utilisés contre
la classe ouvrière. Ces exemples sont nombreux. Je rappellerai
par exemple la fameuse lettre de Zinoviev. Cette lettre n'avait
jamais été écrite par Zinoviev. On l'avait
fabriquée. Et ce faux fut utilisé par les conservateurs
anglais contre la classe ouvrière. Je rappellerai une série
de faux qui ont joué un rôle dans la politique
allemande.
Le
président. - Cela sort du cadre de ces débats.
Dimitrov.
- On a affirmé ici que l'incendie du Reichstag devait servir
de signal à une insurrection armée. Et on a cherché
à fonder cette affirmation comme suit :
Goering
a déclaré ici, au procès, que le Parti
communiste allemand, au moment où Hitler a accédé
au pouvoir, était obligé d'exciter l'effervescence des
masses et d'entreprendre une action violente quelconque. Il a dit : «
Les communistes étaient obligés de faire quelque chose
- alors ou jamais ! » Il a affirmé que le Parti
communiste avait depuis de longues années déjà
appelé à la lutte contre le national-socialisme et que
pour le Parti communiste allemand, au moment où les
nationaux-socialistes accédaient au pouvoir, il ne restait
rien d'autre à faire que de déclencher l'action -
maintenant ou jamais. Le procureur général a essayé
ici de formuler la même thèse de façon plus
claire et plus ingénieuse.
Le
président. - Je ne permettrai pas que vous offensiez le
procureur général.
Dimitrov.
- Ce que Goering a affirmé en qualité d'accusateur
suprême, le procureur général l'a développé
ici. Le procureur général, le docteur Werner, a dit :
Le
Parti communiste se trouvait dans cette situation qu'il devait ou
céder sans livrer combat ou accepter le combat, même si
les préparatifs n'avaient pas été achevés.
C'était la seule chance qui restait au Parti communiste dans
les conditions données. Ou bien renoncer sans coup férir
à son but, ou bien se décider à un acte risqué,
jouer son va-tout, ce qui aurait pu modifier la situation en
sa faveur. L'affaire pouvait avorter, mais alors la situation
n'aurait pas été plus mauvaise que si le Parti
communiste avait reculé sans se battre.
La
thèse, formulée ainsi et attribuée au Parti
communiste, n'est pas une thèse communiste. Cette supposition
montre que les ennemis du Parti communiste allemand le connaissent
mal. Qui veut bien combattre son adversaire, doit bien le connaître.
Interdire le Parti, dissoudre les organisations de masse, perdre la
légalité, ce sont là évidemment des coups
sérieux portés au mouvement révolutionnaire.
Mais cela ne signifie pas encore, il s'en faut de beaucoup, que de
ce fait tout soit perdu.
En
février 1933 le Parti communiste était menacé
d'interdiction. La presse communiste était interdite,
l'interdiction du Parti communiste était imminente. Le Parti
communiste allemand s'y attendait. On en parlait dans les tracts,
dans les journaux. Le Parti communiste allemand savait bien que les
Partis communistes sont interdits dans nombre de pays, mais qu'ils
n'en continuent pas moins à travailler et à combattre.
Les Partis communistes sont interdits en Pologne, en Bulgarie, en
Italie et dans certains autres pays.
Je
veux en parler, fort de l'expérience du Parti communiste
bulgare. Ce dernier avait été interdit à la
suite de l'insurrection de 1923, mais il continuait de travailler et,
bien que cela lui ait coûté de nombreuses victimes, il
est devenu plus fort qu'avant 1923. Cela tout homme doué
d'esprit critique comprend l'importance de ce phénomène.
Le
Parti communiste allemand même illégal peut, la
situation s'y prêtant, accomplir la révolution.
L'expérience
du
Parti communiste russe le prouve. Le Parti communiste russe
était illégal, il subissait de sanglantes persécutions,
mais la classe ouvrière, le Parti communiste en tête, a
conquis le pouvoir. Les dirigeants du Parti communiste allemand ne
pouvaient tenir ce raisonnement : devant l'interdiction de leur Parti
tout était perdu et : l'alternative se posait : ou bien
l'insurrection, ou bien la fin. La direction du Parti communiste ne
pouvait avoir une idée aussi stupide. Le Parti communiste
savait pertinemment que le travail illégal coûterait de
lourds sacrifices et exigerait de l'abnégation et du courage,
mais il savait aussi que ses forces révolutionnaires se
consolideraient et qu'il serait capable de réaliser les tâches
qui lui incombent. Aussi la supposition que le Parti communiste
allemand ait voulu dans cette période, jouer son va-tout, doit
être absolument exclue. Par bonheur, les communistes n'ont
pas la vue aussi courte que leurs adversaires, et ils ne perdent pas
la tête dans les situations difficiles.
Il
convient d'ajouter à cela que le Parti communiste allemand et
les autres Partis communistes sont des sections de l'Internationale
communiste. Qu'est-ce que l'Internationale communiste ? Je me
permettrai de citer un passage de ses statuts.
Je
cite ici le premier paragraphe :
L'Internationale
communiste, Association internationale des travailleurs, est
l'organisation des Partis communistes des différents pays en
un Parti communiste unique mondial. Guide et organisateur du
mouvement révolutionnaire mondial du prolétariat,
champion des principes et des buts du communisme, l'Internationale
communiste lutte pour la conquête de la majorité de la
classe ouvrière et des grandes couches de paysans pauvres,
pour les principes et les buts du communisme, pour l'instauration de
la dictature mondiale du prolétariat, pour la création
d'une Fédération mondiale des Républiques
socialistes soviétique, pour l'abolition complète des
classes et la réalisation du socialisme, première étape
de la société communiste. (Programme
de l'Internationale communiste, suivi des Statuts de
l'I.C.,
p. 79. (N.R.).)
Dans
ce parti mondial de l'Internationale communiste, comptant des
millions de travailleurs, le Parti communiste de l'Union soviétique
est le plus fort Parti. Il est le Parti
dirigeant
de l'Union soviétique, le plus grand Etat du monde.
L'Internationale communiste, ce Parti communiste mondial, analyse la
situation politique de concert avec la direction des Partis
communistes de tous les pays.
L'Internationale
communiste devant laquelle toutes les sections sont directement
responsables, n'est pas une organisation de conspirateurs, mais un
parti mondial. Un tel Parti mondial ne joue pas aux soulèvements
et à la révolution. Un tel Parti mondial ne peut
dire officiellement à des millions de membres une chose, et
en même temps faire secrètement le contraire. Un
tel Parti, mon excellent docteur Sack, ignore la comptabilité
en partie double !
Docteur
Sack. - Parfait, continuez votre propagande communiste !
Dimitrov.
- Un tel Parti, quand il s'adresse aux millions de prolétaires,
quand il prend ses décisions sur la tactique et les tâches
immédiates, le fait sérieusement, avec la pleine
conscience de sa responsabilité. Je citerai ici la décision
de la XIIe assemblée plénière du
Comité exécutif de l'Internationale communiste. Comme
ces décisions ont été mentionnées au
procès, j'ai le droit d'en donner lecture.
Conformément
à ces décisions, la tâche essentielle du Parti
communiste allemand consistait à
Mobiliser
les millions de travailleurs pour la défense de leurs intérêts
vitaux, contre leur pillage féroce par le capital monopoliste,
contre le fascisme, contre les décrets-lois, contre le
nationalisme et le chauvinisme, en luttant pour l'internationalisme
prolétarien, en développant les grèves
économiques et politiques, les manifestations et en amenant
les masses à la grève politique générale
; gagner les masses principales de la social-démocratie,
liquider résolument les faiblesses du mouvement syndical. Le
principal mot d'ordre que le Parti communiste allemand doit opposer à
celui de la dictature fasciste (« le troisième Reich »),
de même qu'au mot d'ordre du Parti social-démocrate («
la deuxième République »), doit être : la
République ouvrière et paysanne, c'est-à-dire
de l'Allemagne socialiste, soviétique, assurant aussi la
possibilité du rattachement volontaire des peuples d'Autriche
et des autres régions allemandes. (Thèses,
décisions, résolutions de la XIIe assemblée
plénière du Comité exécutif de
l'Internationale communiste. Bureau d'Editions, Paris, 1933, p.
15 (N.R.).)
Travail
de masse, lutte de masse, résistance de masse, front unique,
point d'aventures ! Voilà les bases de la tactique
communiste.
On
a trouvé chez moi, un appel du Comité exécutif
de l'Internationale communiste. J'estime que l'on peut également
le citer. Deux points sont particulièrement importants dans
cet appel. Ainsi, on y parle des démonstrations qui se
déroulent dans différents pays en liaison avec les
événements d'Allemagne. On y parle des tâches du
Parti communiste dans sa lutte contre la terreur national-socialiste,
ainsi que pour la défense des organisations et de la presse de
la classe ouvrière. Il est dit, entre autres, dans cet appel :
Le
principal obstacle dans la voie de la réalisation du front
unique de lutte des ouvriers communistes et social-démocrates,
a été et reste la politique de collaboration avec la
bourgeoisie, suivie par les partis social-démocrates, qui
actuellement ont amené et exposé le prolétariat
international aux coups de l'ennemi de classe. Cette politique de
collaboration avec la bourgeoisie, connue sous le nom de politique
dite du « moindre mal », a, en fait, amené en
Allemagne le triomphe de la réaction
fasciste.
L'Internationale
communiste et les Partis communistes de tous les pays ont plus d'une
fois affirmé leur volonté de lutter en commun avec les
ouvriers social-démocrates contre l'offensive du Capital, la
réaction politique et la menace de guerre. Les Partis
communistes ont été les organisateurs de la lutte
commune des ouvriers communistes, social-démocrates qui
brisaient systématiquement le front unique des masses
ouvrières. Déjà le 20 juillet de l'année
dernière le Parti communiste allemand, après
l'effondrement du gouvernement social-démocrate prussien Von
Papen, adressait au parti social-démocrate et à la
Centrale syndicale d'Allemagne, la proposition d'organiser une grève
commune contre le fascisme. Mais le parti social-démocrate et
la Centrale syndicale d'Allemagne, avec l'approbation de toute la IIe
Internationale, qualifièrent cette proposition d'organiser la
grève commune, de provocation. Le Parti communiste allemand
renouvela sa proposition d'action commune au moment où Hitler
accédait au pouvoir, invitant le Comité central du
parti social-démocrate et la direction de la Centrale
syndicale allemande à organiser en commun la résistance
au fascisme. Mais cette fois encore, sa proposition fut repoussée.
Bien
plus, lorsqu'en novembre de l'an dernier les travailleurs des
transports berlinois se mirent unanimement en grève contre la
réduction des salaires, la social-démocratie
torpilla
le front unique de lutte. La pratique du mouvement ouvrier
international est pleine d'exemples analogues.
Cependant
l'appel du Bureau de l'Internationale ouvrière socialiste du
19 février de cette année, contient la déclaration
des partis social-démocrates, affiliés à cette
Internationale, affirmant leur volonté d'établir le
front unique avec les communistes pour la lutte contre la réaction
fasciste en Allemagne. Cette déclaration est en contradiction
flagrante avec tous les actes de l'Internationale socialiste et des
partis social-démocrates, jusqu'à ce jour. Toute la
politique et l'activité de l'Internationale socialiste jusqu'à
présent donnent à l'Internationale ouvrière et
aux partis communistes le droit de ne pas croire à la
sincérité de la déclaration du Bureau de
l'Internationale ouvrière socialiste, lequel fait cette
proposition au moment où, dans toute une série de pays,
en Allemagne avant tout, la classe ouvrière elle-même
prend déjà l'organisation du front unique de lutte dans
ses propres mains.
Néanmoins,
en présence du fascisme qui attaque la classe ouvrière
d'Allemagne et dénoue toutes les forces de la réaction
mondiale, le Comité exécutif de l'Internationale
communiste appelle tous les Partis communistes à faire encore
une tentative pour établir le front unique avec les masses
ouvrières social-démocrates par l'intermédiaire
des partis social-démocrates. Le Comité exécutif
de l'Internationale communiste fait cette tentative dans la ferme
conviction que le front unique de la classe ouvrière contre la
bourgeoisie repousserait l'offensive du Capital et du fascisme et
accélérerait grandement la fin inévitable de
toute l'exploitation capitaliste.
Etant
donné les conditions particulières de chaque pays et la
diversité des tâches concrètes de lutte qui se
posent devant la classe ouvrière dans chacun d'eux, l'accord
entre les Partis communistes et les partis social-démocrates
en vue d'actions déterminées contre la bourgeoisie,
peut être réalisé avec le plus de succès
dans le cadre de chaque pays. Aussi le Comité exécutif
de l'Internationale communiste recommande-t-il aux partis
social-démocrates adhérants à l'Internationale
socialiste, l'action commune contre le fascisme et l'offensive du
Capital. Ces pourparlers doivent avoir pour base les conditions
élémentaires de la lutte commune contre l'offensive du
Capital et du fascisme. Sans un programme concret d'action contre la
bourgeoisie, tout accord entre les partis serait dirigé contre
les intérêts de la classe ouvrière...
Devant
l'ensemble de la classe ouvrière internationale, le Comité
exécutif de l'Internationale communiste formule ces
propositions et appelle tous les Partis communistes, le Parti
communiste d'Allemagne en premier lieu, sans attendre le
résultat
des pourparlers et des accords sur la lutte commune avec la
social-démocratie, à procéder immédiatement
à l'organisation de comités de lutte communs, tant avec
les ouvriers social-démocrates qu'avec les ouvriers de toutes
les autres tendances.
Les
communistes ont démontré par leur lutte de longues
années qu'ils ont été et seront toujours aux
premiers rangs de la lutte pour le front unique non en paroles mais
en fait, dans les actions de classe contre la bourgeoisie.
Le
Comité exécutif de l'Internationale communiste est
fermement convaincu que les ouvriers social-démocrates et
sans-parti, indépendamment de l'attitude que les chefs de la
social-démocratie observent à l'égard de la
création du front unique, surmonteront tous les obstacles et
réaliseront, en commun avec les communistes, le front unique
non en paroles mais en fait. Maintenant surtout que le fascisme
allemand a organisé, en vue d'écraser le mouvement
ouvrier d'Allemagne, une provocation inouïe (l'incendie du
Reichstag, faux relatif à l'insurrection, etc.), chaque
ouvrier doit comprendre son devoir de classe dans la lutte contre
l'offensive du Capital et de la réaction fasciste.
Cet
appel ne dit rien d'une lutte immédiate pour la prise du
pouvoir. Cette tâche n'a été posée ni par
le Parti communiste allemand, ni par l'Internationale communiste. Il
est naturellement vrai que l'appel de l'Internationale communiste
n'écarte pas la possibilité d'une insurrection armée.
Le tribunal en a faussement conclu que dès l'instant où
le Parti communiste se propose comme but une insurrection armée,
c'est donc que cette insurrection était préparée
en fait et devait immédiatement éclater. Cela est
illogique, inexact, pour ne pas dire plus. Oui, bien entendu, lutter
pour la dictature du prolétariat est la tâche des Partis
communistes du monde entier. C'est notre principe, c'est notre but.
Mais c'est là un programme précis, pour la
réalisation duquel sont nécessaires non seulement les
forces de la classe ouvrière, mais encore des autres couches
de travailleurs.
Que
le Parti communiste allemand ait été pour la révolution
prolétarienne, tout le monde le sait. Mais ce n'est point là
la question qui doit être résolue à ce procès.
La question est de savoir si réellement une insurrection armée
avait été fixée au 27 février pour la
prise du pouvoir, en liaison avec l'incendie du Reichstag.
Qu'est-il
résulté de l'instruction judiciaire, messieurs les
juges ? La légende visant à faire croire que l'incendie
du Reichstag était l'線vre des communistes, s'est effondrée
complètement. Je ne vais pas citer les témoignages
apportés, ainsi que l'ont fait les autres défenseurs.
Mais cette question peut être considérée comme
entièrement élucidée pour tout homme au jugement
normal. L'incendie du Reichstag ne se trouve en aucune liaison avec
l'activité du Parti communiste, non seulement avec une
insurrection, mais avec une démonstration, une grève ou
tout autre action de ce genre. Ceci a été parfaitement
prouvé par l'instruction. L'incendie du Reichstag - je ne
parle pas des affirmations de malfaiteurs et d'anormaux, - n'a été
compris par personne comme le signal de l'insurrection. Personne n'a
remarqué, en liaison avec l'incendie du Reichstag, aucun acte,
action ou tentative d'insurrection. Personne n'avait alors rien
entendu à ce sujet. Tous les racontars sur ce point se
rattachent à une période beaucoup plus récente.
La classe ouvrière se trouvait alors en état de
défensive contre l'attaque du fascisme. Le Parti communiste
allemand s'efforçait d'organiser la résistance des
masses, leur défensive. Mais il a été démontré
que l'incendie du Reichstag a fourni le prétexte, a été
le prélude d'une campagne destructrice largement conçue
contre la classe ouvrière et son avant-garde, le Parti
communiste. Il a été irréfutablement prouvé
que les représentants responsables du gouvernement n'avaient
même pas songé les 27 et 28 février que
l'insurrection communiste était imminente.
J'ai
posé à ce sujet nombre de questions aux témoins
cités ici. J'ai interrogé tout d'abord Heller, le
fameux Karwahne (rire dans la salle), Frey, le comte Heldorf,
les fonctionnaires de police. Malgré les différentes
variantes, tous m'ont répondu qu'ils n'avaient pas entendu
dire qu'une insurrection communiste dût éclater. Cela
signifie que les milieux dirigeants n'avaient pris absolument aucune
mesure contre la possibilité d'une telle insurrection.
Le
président. - Pourtant, le tribunal a reçu
communication du chef du département occidental de la police
sur ce point.
Dimitrov.
- Le chef du département occidental de la police, dans sa
communication, rapporte que Goering
l'avait
mandé auprès de lui et lui avait donné des
instructions verbales sur la lutte contre les réunions
communistes, grèves, démonstrations, campagne
électorale, etc. Mais, même cette communication ne dit
pas que des mesures avaient été prises contre
l'insurrection communiste imminente.
Hier,
l'avocat Seifert a également parlé de cela. Il a fait
cette conclusion que personne dans les milieux dirigeants ne
s'attendait à une insurrection à ce moment. Seifert se
référait à Goebbels, indiquant que ce dernier
n'avait pas tout d'abord ajouté foi à la nouvelle de
l'incendie du Reichstag. En a-t-il été ainsi ? C'est là
une autre
question.
A
cet égard, une preuve est également fournie par le
décret-loi du gouvernement allemand, en date du 28 février
1933. Ce décret fut promulgué aussitôt après
l'incendie. Lisez-le. Que dit-il ? Il y est dit que tels ou tels
articles de la constitution sont supprimés, à savoir
les articles concernant la liberté d'organisation, la liberté
de la presse, l'inviolabilité de la personne, l'inviolabilité
du domicile, etc. C'est là le fond du décret-loi, de
son deuxième paragraphe. L'offensive contre la classe
ouvrière...
Le
président. - Pas contre les ouvriers, mais contre les
communistes...
Dimitrov.
- Je dois dire qu'en vertu de ce décret-loi on arrêta
non seulement des communistes, mais aussi des ouvriers
social-démocrates et chrétiens, on interdit leurs
organisations. Je voudrais souligner que ce décret-loi était
dirigé non seulement contre le Parti communiste allemand, -
quoique, bien entendu, avant tout, contre ce dernier, - mais aussi
contre les autres partis et groupes d'opposition. Cette loi était
nécessaire pour instaurer le régime d'exception, elle
est directement, organiquement, liée à l'incendie du
Reichstag.
Le
président. - Si vous continuez à attaquer le
gouvernement allemand, je vous retirerai la parole,
Dimitrov.
- Dans ce procès, une question n'a pas du tout été
éclaircie.
Le
président. - En parlant vous devez vous adresser aux juges,
et non à la salle, autrement votre discours peut être
considéré comme de la propagande.
Dimitrov.
- Une question n'a pas été éclaircie, ni par
le ministère public, ni par la défense. Je ne m'étonne
pas qu'ils n'aient pas jugé cela indispensable. Ils redoutent
beaucoup cette question. C'est la question de savoir quelle était
la situation politique en Allemagne en février 1933. Je dois
m'arrêter sur ce point. Fin février, la situation
politique était telle qu'à l'intérieur du camp
du front national la lutte se livrait...
Le
président. - Vous vous engagez sur un terrain, que je vous
ai déjà interdit plus d'une fois.
Dimitrov.
- Je tiens à rappeler la proposition que j'ai faite au
tribunal, de citer des témoins tels que Schleicher, Brüning,
Papen, Hugenberg, vice-président du Casque d'Acier,
Duesterberg, etc.
Le
président. - Mais la Cour a refusé de faire
comparaître ces témoins. Aussi ne devez-vous pas vous y
arrêter.
Dimitrov.
- Je le sais et, de plus, j'en connais la raison.
Le
président. - Il m'est désagréable de vous
interrompre sans cesse pendant votre dernière intervention,
mais vous devez vous conformer à mes injonctions.
Dimitrov.
- Cette lutte intérieure dans le camp national se
poursuivait en liaison avec la lutte menée dans les coulisses
entre les dirigeants de l'économie allemande. La lutte se
poursuivait entre les milieux de Thyssen et Krupp (industrie de
guerre), qui ont financé des années durant le mouvement
national-socialiste, et leurs concurrents qui devaient être
refoulés au second plan.
Thyssen
et Krupp voulaient établir dans le pays une dictature
politique, une domination absolue, sous leur direction personnelle ;
à cet effet, il fallait écraser le prolétariat
révolutionnaire. Le Parti communiste s'efforçait, dans
cette période, de créer le front unique pour rassembler
toutes les forces en vue de résister aux tentatives des
nationaux-socialistes pour anéantir le mouvement ouvrier. Une
partie des ouvriers social-démocrates sentaient la nécessité
du front unique de la classe ouvrière. Ils s'en rendaient
compte. Des milliers d'ouvriers social-démocrates rejoignirent
les rangs du Parti communiste allemand. Mais, en février et
mars, la tâche consistant à établir le front
unique ne signifiait nullement l'insurrection ni sa préparation,
mais seulement la mobilisation de la classe ouvrière contre la
campagne spoliatrice des capitalistes et contre la violence des
nationaux-socialistes.
Le
président (interrompant Dimitrov). - Vous avez
toujours souligné que vous vous intéressez uniquement à
la situation politique en Bulgarie ; or vos développements de
tout à l'heure prouvent que vous avez manifesté un très
grand intérêt pour les questions politiques d'Allemagne.
Dimitrov.
- Monsieur le Président, vous m'adressez un reproche. A cela
je ne puis que vous répondre ceci : comme révolutionnaire
bulgare je m'intéresse au mouvement révolutionnaire de
tous les pays. Je m'intéresse, par exemple, aux questions
politiques sud-américaines, et je les connais peut-être
aussi bien que les questions allemandes, bien que n'ayant jamais été
en Amérique. Au reste, cela ne veut point dire que si en
Amérique du Sud, le siège de quelque Parlement vient à
brûler, ce sera de ma faute. Je m'intéresse à la
politique allemande, mais je ne me mêle pas des affaires
politiques de l'Allemagne.
Au
cours de ces débats, j'ai appris bien des choses et, grâce
à mon sens politique, j'ai vu clair dans bien des détails.
La situation politique de cette période comportait deux
facteurs essentiels : le premier, c'est l'effort des
nationaux-socialistes pour accéder au pouvoir ; le deuxième
- à l'opposé du premier - c'est l'activité
du Parti communiste visant à créer le front unique des
ouvriers contre le fascisme. A mon avis, cela s'est révélé
également pendant ces débats.
Les
nationaux-socialistes avaient besoin d'une man線vre de diversion,
pour détourner l'attention des difficultés qui
existaient à l'intérieur du camp national et briser le
front unique des ouvriers. Le « gouvernement national »
avait besoin d'un prétexte valable pour lancer son décret-loi
du 28 février qui supprimait la liberté de la presse,
l'inviolabilité de la personne, et inaugurait un système
de répression policière, de camps de concentration et
autres mesures de lutte contre les communistes.
Le
président (interrompant Dimitrov). - Vous voilà
arrivé à l'extrême limite, vous faites des
allusions !
Dimitrov.
- Je veux simplement éclairer la situation politique en
Allemagne à la veille de l'incendie du Reichstag, comme je la
comprends.
Le
président. - Il n'y a pas place ici pour des allusions à
l'adresse du gouvernement et pour des affirmations depuis longtemps
réfutées.
Dimitrov.
- La classe ouvrière devait se défendre de toutes ses
forces, et c'est pour cela que le Parti communiste a tenté
d'organiser le front unique, en dépit de la résistance
de Wels et de Breitscheid, qui maintenant, à l'étranger,
poussent des clameurs hystériques.
Le
président. - Vous devez passer à votre défense,
si vous le voulez; autrement vous n'aurez pas assez de temps pour le
faire.
Dimitrov.
- J'ai déjà déclaré que sur un point je
suis d'accord avec l'acte d'accusation. Maintenant, il faut confirmer
cet accord. C'est en ce qui concerne la question de savoir si Van der
Lübbe a organisé l'incendie seul ou s'il avait des
complices. Le représentant de l'accusation Parisius a déclaré
ici que, de la réponse à la question de savoir si Van
der Lübbe avait ou non des complices, dépendait le sort
des accusés. Je réponds à cela : non, mille fois
non : cette conclusion du procureur est illogique. J'estime que
Van der Lübbe n'a réellement pas été seul à
incendier le Reichstag. L'expertise et les données
ressortant de ces débats m'amènent à conclure
que l'incendie dans la salle des séances du Reichstag était
d'un autre genre que celui allumé dans le restaurant du
rez-de-chaussée, etc. Le feu a été mis à
la salle des séances par d'autres gens et par un autre
procédé. L'incendie allumé par Van der Lübbe
et l'incendie dans la salle des séances coïncident
seulement pour le temps; pour le reste ils sont foncièrement
différents. Le plus probable, c'est que Van der Lübbe
a été l'instrument inconscient de ces gens, instrument
dont on a abusé. Il ne dit pas toute la vérité
ici. Maintenant encore il persiste dans son mutisme. Bien qu'il ait
eu des complices, ce fait ne décide pas du sort des autres
accusés. Van der Lübbe n'a pas été seul,
c'est vrai, mais ceux qui étaient avec lui n'étaient ni
Torgler, ni Popov, ni Tanev, ni Dimitrov.
N'est-il
pas probable que, le 26 février, Van der Lübbe a
rencontré à Hoenigsdorf une personne à qui il a
communiqué ses tentatives de mettre le feu à l'Hôtel
de ville et au palais ? Que cet homme lui a dit que tous ces
incendies ne
sont que des jeux d'enfants, qu'une affaire sérieuse, ce
serait l'incendie du Reichstag pendant les élections ? Et
n'est-il pas probable que c'est ainsi que de l'union secrète
entre la démence politique et la provocation politique a surgi
l'incendie du Reichstag ? L'allié du côté de la
démence politique est au banc des prévenus. Quant aux
alliés du côté de la provocation politique, ils
sont en liberté. Tandis que le naïf Van der Lübbe
faisait ses tentatives malhabiles pour mettre le feu au restaurant,
dans le corridor et au rez-de-chaussée, des inconnus se
servant de ce liquide inflammable secret dont a parlé le
docteur Schatz, ne perpétraient-ils pas l'incendie de la salle
des séances ? (Van der Liibbe se met à rire. Tout
son corps est secoué d'un rire silencieux. L'attention de
toute la salle, des juges et des prévenus se porte à ce
moment sur Lùbbe.)
Dimitrov
(montrant Lübbe). - Les complices inconnus ont veillé
à tous les préparatifs de l'incendie. Ce Méphistophélès
a su disparaître sans laisser de traces. Et voilà qu'ici
se trouve l'instrument stupide, le pitoyable Faust, tandis que
Méphistophélès a disparu. Le plus probable,
c'est qu'un pont a été jeté à Hoenigsdorf
entre Van der Lübbe et les représentants de la
provocation politique, les agents des ennemis de la classe ouvrière.
Le
procureur général Werner a déclaré ici
que Van der Lübbe était un communiste ; il a dit ensuite
que si même il n'était pas communiste, il a accompli son
線vre dans l'intérêt du Parti communiste et en liaison
avec ce dernier. C'est là une affirmation fausse.
Qui
est Van der Lübbe ? Un communiste ? Pas du tout ! Un anarchiste
? Non. C'est un ouvrier déclassé, c'est une épave
rebelle de la société, une créature dont on a
abusé, qu'on a utilisée contre la classe ouvrière.
Non il n'est pas communiste. Il n'est pas anarchiste. Pas un seul
communiste au monde, pas un seul anarchiste ne se comporterait devant
le tribunal comme le fait Van der Lübbe. Les anarchistes
commettent souvent des actes insensés, mais toujours devant
les juges, ils revendiquent leurs responsabilités et
expliquent leurs buts. Si un communiste avait fait quelque chose
d'analogue, il ne se tairait pas devant le tribunal, alors que quatre
innocents sont au banc des accusés à ses côtés.
Non, Van der Lübbe n'est pas un
communiste,
ni un anarchiste, il est l'instrument dont a abusé le
fascisme.
Avec
cet homme, avec ce misérable instrument dont on a abusé,
que l'on a utilisé au préjudice du communisme, il ne
peut y avoir rien de commun, il ne peut y avoir aucune relation entre
lui et le président de la fraction communiste du Reichstag,
entre lui et les communistes bulgares.
Je
dois rappeler ici que le 28 février au matin, Goering a publié
un communiqué sur l'incendie. Ce communiqué annonçait
que Torgler et Koenen s'étaient enfuis des locaux du Reichstag
à 10 heures du soir. Cette nouvelle fut radiodiffusée
dans tout le pays. Le communiqué disait que l'incendie avait
été allumé par les communistes. Toutefois, on
n'a pas fait d'enquête sur les agissements de Van der Lübbe
à Hoenigsdorf. L'homme qui passa la nuit avec Van der Lübbe
au poste de police, n'a pas été retrouvé...
Le
président (interrompant Dimitrov). - Quand avez-vous
l'intention de finir vos discours ?
Dimitrov.
- Je veux parler encore une demi-heure. Je dois exposer ma façon
de voir sur cette question...
Le
président. - On ne peut tout de même pas parler sans
fin.
Dimitrov.
- Pendant les trois mois que dura le procès, monsieur le
Président, vous m'avez, un nombre incalculable de fois,
contraint au silence, en me promettant qu'à la fin du procès
je pourrais parler en détail pour me défendre. Cette
fin du procès est arrivée. Mais contrairement à
votre promesse vous limitez de nouveau mon droit de parole. La
question de ce qui s'est passé à Hoenigsdorf est
extrêmement importante. Waschinski, qui avait passé la
nuit avec Van der Lübbe, n'a pas été retrouvé.
Ma proposition de le découvrir a été reconnue
inutile. L'affirmation que Van der Lübbe s'est trouvé à
Hoenigsdorf avec des communistes est un mensonge monté par le
témoin national-socialiste, le coiffeur Grave. Si Van der
Lübbe avait été à Hoenigsdorf avec des
communistes, la chose aurait été depuis longtemps
élucidée, monsieur le Président. Mais personne
ne s'est préoccupé de découvrir Waschinski.
Le
jeune homme, qui s'était présenté au
commissariat de la porte de Brandebourg pour apporter la première
nouvelle de l'incendie du Reichstag, n'a pas été
recherché ; il reste jusqu'à présent inconnu.
L'instruction a sur une fausse voie. Le docteur Albrecht, député
national-socialiste, qui avait quitté le Reichstag
immédiatement après l'incendie, n'a pas été
interrogé. On n'a pas cherché les incendiaires là
où ils étaient, mais là où ils n'étaient
pas. On les recherchait dans les rangs du Parti communiste, et on
avait tort. Cela a permis aux vrais incendiaires de disparaître.
On a donc décidé : du moment qu'on n'a pas pris et
qu'on n'a pas osé prendre les vrais fauteurs de l'incendie, il
faut en prendre d'autres, des « ersatz-incendiaires »
pour ainsi dire, du Reichstag...
Le
président. - Je vous interdis de dire cela, et je vous donne
encore dix minutes.
Dimitrov.
- J'ai le droit d'apporter et de motiver des propositions
concernant le verdict. Le procureur général a traité
toutes les dépositions des communistes comme indignes de foi.
Je n'adopterai pas une position contraire. Je n'affirmerai pas, par
exemple, que tous les témoins nationaux-socialistes sont des
menteurs. Je pense que parmi les millions de nationaux-socialistes il
se trouve aussi d'honnêtes gens...
Le
président. - Je vous interdis de pareilles remarques
malveillantes.
Dimitrov.
- N'est-il pas significatif que tous les principaux témoins
à charge sont des députés nationaux-socialistes,
des journalistes et des partisans du national-socialisme ? Le député
national-socialiste Karwahne n'a-t-il pas dit avoir vu Torgler en
compagnie de Van der Lübbe au Reichstag ? Le député
national-socialiste Frey a déclaré avoir vu Popov avec
Torgler au Reichstag. Le garçon de restaurant
national-socialiste Hellmer a témoigné qu'il avait vu
Van der Lübbe avec Dimitrov. Le journaliste national-socialiste
Weberstedt aurait vu Tanev avec Van der Lübbe. Est-ce un effet
du hasard ? Le docteur Dröscher, qui est intervenu ici en
qualité de témoin, et qui est en même temps
collaborateur au Völkischer Beobachter,
Zimmermann...
Le
président (interrompant Dimitrov). - Cela n'est
pas
démontré.
Dimitrov.
- ... a affirmé que Dimitrov est l'organisateur de
l'explosion à la cathédrale de Sofia, ce qui a été
démenti, et qu'il m'aurait vu avec Torgler au Reichstag. Je
déclare, avec une certitude à cent pour cent, que
Dröscher et Zimmermann, ce n'est qu'une et même
personne...
Le
président. - Je le nie, cela n'est pas prouvé.
Dimitrov.
- Le fonctionnaire de police Heller a cité ici un poème
communiste pris dans un livre édité en 1925, pour
démontrer que les communistes ont mis le feu au Reichstag en
1933.
Je
me permettrai également de citer des vers du plus grand poète
d'Allemagne, Goethe :
Apprends
à être plus intelligent.
L'aiguille
de la grande balance
Du
bonheur reste rarement en repos ;
Tu
dois ou t'élever
Ou
descendre ;
Tu
dois dominer et gagner,
Ou
bien servir et perdre.
Souffrir
ou triompher,
Etre
l'enclume ou le marteau.
Oui,
quiconque ne veut pas être l'enclume, doit être le
marteau ! Cette vérité, la classe ouvrière
allemande dans son ensemble, ne l'a comprise ni en 1918, ni en
1923, ni le 20 juillet 1932, ni en janvier 1933. La faute en est aux
chefs social-démocrates, aux Wels, Severing, Braun, Leipart,
Grasseman. Aujourd'hui, bien entendu, les ouvriers allemands
pourront la comprendre !
On
a beaucoup parlé ici du droit allemand et de la légalité,
et je tiens à dire mon opinion à ce sujet également.
Le jugement d'un tribunal se ressent toujours, incontestablement, des
combinaisons politiques du moment actuel et des tendances politiques
dominantes.
Le
ministre de la justice Kerl est sans aucun doute pour le tribunal,
une autorité compétente. Il a exprimé son
opinion dans une interview publiée dans la presse.
La
prévention du droit libéral formel,
déclare-t-il, consiste à affirmer que la justice
doit avoir le culte de l'objectivité. Maintenant nous
en sommes arrivés à la source d'éloignement
entre le peuple et la justice et la faute de cet
éloignement retombe toujours en fin de compte sur la justice.
Qu'est-ce que l'objectivité au moment où le
peuple lutte pour son existence ? Le soldat combattant, l'armée
combattante connaissent-ils l'objectivité ? Le soldat et
l'armée ne savent qu'une chose, ne savent qu'une
considération, ne connaissent qu'une seule question : Comment
dois-je sauver la liberté et l'honneur ? Comment sauver
la nation ?
Ainsi,
il va de soi que la justice d'un peuple qui combat dans une lutte à
mort, ne peut avoir le culte d'une objectivité morte.
Les dispositions du tribunal, du ministère public, des avocats
doivent être dictées exclusivement par cette seule
considération, à savoir : qu'est-ce qui importe
pour la vie de la nation ? Qu'est-ce qui sauvera le peuple ?
Ce
n'est pas l'objectivité invertébrée qui
signifie le marasme et, par là même, la
pétrification, l'éloignement vis-à-vis du
peuple, non, tous les actes, toutes les mesures prises par la
collectivité dans son ensemble et par chaque individu doivent
être subordonnés aux besoins immédiats du peuple,
de la nation.
Ainsi,
le droit est une notion relative...
Le
président. - Cela n'a pas de rapport avec le sujet. Vous
devez faire vos propositions.
Dimitrov.
- Le procureur général a proposé d'acquitter
les prévenus bulgares, à défaut de preuves de
culpabilité.
Le
procureur général a proposé d'acquitter les
Bulgares accusés, faute de preuves. Mais cela ne saurait
nullement me satisfaire. La question est loin d'être aussi
simple.
Cela
n'écarterait pas complètement les soupçons. Au
cours du procès, il a été démontré
péremptoirement que nous n'avons rien de commun avec
l'incendie du Reichstag et que, par conséquent, il n'y avait
pas la moindre base pour justifier des soupçons contre nous.
Nous, Bulgares, aussi bien que Torgler, devons être acquittés,
non pas faute de preuves, mais parce que nous, communistes, n'avons
rien et ne pouvions rien avoir de commun avec un acte anticommuniste.
Je
propose donc de rendre le jugement que voici :
1.
La Cour suprême reconnaît notre innocence dans l'affaire,
et l'accusation injustifiée ; ceci est vrai pour nous : -
pour moi, Torgler, Popov, Tanev.
2. Déclare
que Van der Lübbe
a été instrument utilisé au détriment et
au préjudice de la classe ouvrière.
3. Qu'il
convient de mettre en jugement les personnes coupables d'avoir porté
de fausses accusations contre nous.
4. Et
de nous dédommager aux dépens de ces coupables pour le
temps perdu, la santé compromise et les souffrances endurées.
Le
président. - Ce que vous nommez vos propositions, le
tribunal les aura en vue au cours de la délibération
sur le verdict à prendre.
Dimitrov.
- Le temps viendra où ces comptes seront réglés
avec intérêts. La pleine lumière sur la question
de l'incendie du Reichstag et les véritables incendiaires
c'est, évidemment, le tribunal du peuple de la future
dictature du prolétariat qui s'en chargera.
Au
XVIIe siècle, le fondateur de la physique
scientifique Galileo Galilée, a comparu devant le
sévère tribunal de l'Inquisition qui devait le
condamner, comme hérétique, à la mort, il s'est
écrié avec une profonde conviction et résolution
:
«
Et pourtant la terre tourne ! » Et ce principe scientifique est
devenu plus tard le patrimoine de toute l'humanité.
(Le
président interrompt brutalement Dimitrov, se lève,
rassemble ses papiers, et s'apprête à sortir.)
Dimitrov
(continuant) : Nous, communistes, pouvons aujourd'hui,
proclamer avec non moins de résolution que le vieux Galilée
:
«
Et pourtant elle tourne ! » La roue de l'histoire tourne,
avance, vers une Europe soviétique, vers l'Union mondiale des
Républiques soviétiques. Et cette roue, poussée
par le prolétariat sous la direction de l'Internationale
communiste, on ne parviendra à l'arrêter ni par des
mesures d'extermination, ni par des condamnations aux travaux forcés,
ni par des exécutions. Elle tourne et continuera à
tourner jusqu'à la victoire définitive du communisme !
(Les
policiers empoignent Dimitrov et le forcent à se rasseoir sur
le banc des accusés. Le président et le tribunal
s'éloignent pour délibérer sur la question de
savoir si Dimitrov peut continuer son discours. Après
délibération, la Cour revient et annonce que la parole
est définitivement retirée à Dimitrov.)
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