Histoire du bolchévisme

 

 



4.Le début de la construction du socialisme
(1921-1929)
a)La réorganisation de l’économie et l’apparition de l’opposition dans le Parti (1921-1924)

Il va de soi que la production économique était dans une situation catastrophique, de fait son niveau était celui de la moitié de celle d’avant-guerre. Dans la grande industrie, le niveau était à 1/7ème du niveau d’avant-guerre. Le communisme de guerre, qui ponctionnait les paysans durement pour faire fonctionner l’armée, amenait de nombreuses révoltes, notamment en Sibérie et en Ukraine. Les contre-révolutionnaires en profitaient, mettant en avant le slogan  « les soviets sans les communistes ».

L’apogée de cette récupération du mécontentement populaire fut la révolte des marins de Kronstadt en mars 1921, qui entendaient un pouvoir « ni rouge ni blanc », servant objectivement la contre-révolution. La révolte fut écrasée par l’armée rouge.

Dans le Parti les tendances se multipliaient, évolution permise par le fort afflux de membres, qui ne pouvaient pas être bien formés dans la guerre civile. Se développèrent ainsi :

L’opposition ouvrière (Chliapnikov, Medvedev, Kollontaï), déviation anarcho-syndicaliste exigeant que le pouvoir revienne aux syndicats ;

Le groupe dit du « centralisme démocratique » (Sapronov, Ossinsky), déviation de type socialiste-révolutionnaire et menchévique soutenant l’indépendance syndicale ;
Les trotskystes, c’est-à-dire les partisans de Trotsky, allié à Préobrajensky, Sokolnikov et Boukharine.

Lénine publia alors une série d’articles, principalement contre les trotskystes. En décembre 1920 ce fut « Sur les syndicats, le moment présent et les fautes du camarade Trotsky », puis en janvier 1921 « Une fois de plus sur les syndicats, le moment présent et les fautes de Trotsky et Boukharine ».

Lénine y critique les positions théoriques de Trotsky, qui prône l’étatisation des syndicats, mais également la manière fractionniste de mettre ses thèses en avant.
Que dit Lénine ?

« La faute principale de Trotsky est de tirer le Parti et le pouvoir soviétique en arrière, en posant maintenant la question de « principe ». Grâce à Dieu, nous sommes déjà passés des principes au travail pratique, actif (..).

J’ai dû énumérer moi-même mes « désaccords » avec Trotsky, car, dans ce vaste sujet : rôle, tâche des syndicats, j’estime que Trotsky est tombé dans une série d’erreurs liées à l’essence même de la question de la dictature du prolétariat (..). De sa théorie, il ressort que la défense des intérêts matériels et spirituels de l’ouvrier n’incombe pas aux syndicats de l’Etat ouvrier.

C’est une erreur. Trotsky parle de « l’Etat ouvrier ». Permettez, c’est une abstraction. Quand, en 1917, nous parlions de l’Etat ouvrier, c’était compréhensible ; mais maintenant, quand on nous dit : « Pourquoi, contre qui défendre la classe ouvrière, puisqu’il n’y a plus de bourgeoisie, puisque l’Etat est ouvrier », on commet là une erreur manifeste.

L’Etat n’est pas tout à fait ouvrier, voilà le hic. C’est là une des erreurs fondamentales de Trotsky (..).

Tout bien considéré, j’estime que c’est une grande faute que de soumettre toutes ces divergences de vues à une large discussion dans le Parti et de les porter devant le congrès du P.C.R.. Politiquement, c’est une faute.

En commission seulement, nous aurions pu nous livrer à un examen pratique et nous aurions progressé, alors que, maintenant, nous revenons en arrière et que, durant quelques semaines, nous continuerons à revenir en arrière vers des thèses abstraites, au lieu d’aborder pratiquement la question.

Aussi les thèses de Trotsky et de Boukharine renferment toute une série d’erreurs théoriques fondamentales. Politiquement, cette façon d’envisager la question dénote un manque doigté extraordinaire. Les « thèses » de Trotsky sont nuisibles politiquement.

Sa politique est une politique de houspillement bureaucratique des syndicats. Et le congrès de notre Parti, j’en suis certain, condamnera et rejettera cette politique ».

C’est dans ce climat conflictuel que se tint le 10ème congrès, du 8 au 16 mars 1921 avec 694 délégués représentant 732.521 membres. Lénine, qui fait le discours d’ouverture, annonce la couleur :

« Camarades, nous avons vécu une année exceptionnelle, nous nous sommes permis le luxe de discussions et de débats au sein de notre parti. Pour un parti entouré d’ennemis, des ennemis les plus puissants et les plus forts qui groupent le monde capitaliste, pour un parti qui supporte un fardeau incroyable, ce luxe était vraiment surprenant !

Je ne sais pas ce que vous en pensez aujourd’hui. Ce luxe concordait-il entièrement, d’après vous, avec nos richesses matérielles et morales ?

C’est à vous de juger. Toujours est-il que je crois devoir vous dire une chose : au cours de ce congrès, nous devons nous fixer comme mot d’ordre et nous assigner comme principal but, comme principale tâche à réaliser coûte que coûte, de sortir des discussions et des débats plus forts que nous n’étions avant de les engager ».

De fait ce congrès est celui de la critique de la déviation anarcho-syndicaliste et petite-bourgeoise dans le Parti. Un rapport est fait sur « l’unité du parti et la déviation anarcho-syndicaliste ».

C’est également à ce congrès qu’est décidé la mise en place de la NEP, la nouvelle politique économique. Il s’agit d’un recul temporaire du socialisme, laissant place aux échanges capitalistes afin de relancer la production (agricole) et de gagner du temps.

Le Parti mena également une purge, rejetant 170.000 personnes soit 25% de ses effectifs. Les résultats se virent au 11ème congrès en mars 1922, où 522 délégués représentaient 532.000 membres.

Lénine réaffirme la nécessité du moment : 

« Mais maintenant nous  n’avons plus d’issues. Permettez-moi de vous le dire sans aucune exagération. De sorte qu’ici ce sera réellement la « lutte finale », non pas avec le capitalisme international - sur ce terrain nous aurons encore à livrer plus d’une « lutte finale » -, mais avec le capitalisme russe, avec celui qu’engendre et alimente la petite économie paysanne.

C’est là que nous aurons à livrer très prochainement un combat dont on ne saurait exactement dire la date. Ce sera la « lutte finale » ; et il ne saurait être question d’aucune échappatoire, ni politique, ni autre, puisque ce sera la compétition engagée avec le capital privé. Ou bien nous subirons avec succès cette épreuve avec le capital privé, ou bien ce sera un échec complet ».

Le congrès fixe la ligne : de la NEP il faudra passer au socialisme. En décembre 1922 c’est alors la formation de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques.

Le 12ème congrès en avril 1923 se déroule sans Lénine, gravement malade depuis l’année précédente, suite aux séquelles d’un attentat socialiste-révolutionnaire.

Il donne néanmoins diverses directives, comme le montre le texte « Mieux vaut moins, mais mieux » (mars 1923). Est ainsi fondée, conformément à une proposition écrite de Lénine, une commission centrale d’inspection et de contrôle ouvrière et paysanne, qui doit s’occuper de la discipline dans le Parti et l’Etat, veiller sur l’unité du Parti, renforcer l’appareil d’Etat.

Et, si courant 1924 l’économie se redresse, grâce à la NEP, politiquement le Parti subit la formation de fractions, pourtant interdites. Ainsi, les trotskystes, le reste des « communistes de gauche », des « centralistes démocratiques » et de « l’opposition ouvrière » publièrent un manifeste, celui des « 46 oppositionnels ».

Leur plate-forme (dit « des 46 ») fut envoyée dans toutes les cellules ; l’objectif de la plate-forme était de renverser l’appareil du parti. D’où, au 13ème congrès en mai 1924 (748 délégués pour 735.881 membres), la définition de « trotskysme » comme forme petite-bourgeoise, sa critique et l’affirmation de la nécessité de liquider cette idéologie.

Et d’où la publication par Staline d’une série d’articles, qui seront rassemblés et formeront l’ouvrage « Les principes du léninisme ». Trotsky avait lui de son côté publié « les leçons d’octobre », dont la présentation de l’histoire de la révolution russe avait causé un énorme scandale dans le parti, Trotsky s’appropriant les mérites de Lénine et critiquant les bolchéviks.

Trotsky dut reculer et faire son autocritique.

Le Parti vivait alors une situation difficile, d’autant plus que son chef, Lénine, était décédé le 21 janvier 1924. La victoire sur l’offensive de Trotsky ne fut que temporaire, car dès début 1925 Kamenev et Zinoviev attaquèrent le comité central, affirmant qu’à cause du caractère arriéré de la situation technique et économique, le socialisme ne pourrait triompher.

Trotsky remit en avant ses thèses de la « révolution permanente », et Boukharine prôna un développement économique acceptant la bourgeoisie comme classe s’enrichissant. L’alliance de qui s’appela la « nouvelle opposition » entendait gagner des points au 14ème congrès de décembre 1925.

Celui-ci rassembla 665 délégués représentant 643.000 membres (de nombreux membres de la « promotion Lénine » de 1924 ayant été purgé), et défendit la possibilité du « socialisme dans un seul pays ».

Le Parti prit le nom de PC d’Union Soviétique [bolchévik], rejetant les thèses de l’opposition. Celle-ci organisa immédiatement sa riposte, notamment à Léningrad, où le comité du mouvement de jeunesse décida de s’opposer aux décisions du congrès. L’affrontement était devenu inévitable.

b)l’industrialisation du pays et la liquidation des positions trotskystes-zinoviévistes (1926-1929)

L’année 1926 est celle de la mise en place de l’industrialisation socialiste, et de la liquidation définitive de l’opposition.

A la fin de 1927, le bloc des partisans de Trotsky et de Zinoviev était un parti totalement indépendant du P.C.U.S.[b] (tout en en faisant encore partie) avec un centre, des comités, une caisse de cotisations.

Le 7 novembre, pour l’anniversaire de la révolution, ils organisèrent même leur propre cortège, qui fut rejeté. Le Comité Central décida alors de l’expulsion de Trotsky et de Zinoviev, puis en décembre le 15ème congrès prit la même mesure contre Kamenev et d’autres. 898 délégués représentaient 887.233 membres. Seulement 1% des votants s’y opposèrent.

Staline expliqua ainsi le problème : 

« Pourquoi le Parti a-t-il exclu Trotsky et Zinoviev ? Parce qu’ils sont les organisateurs de toute l’œuvre de l’opposition, parce qu’ils ont pour but de briser les lois du Parti ; parce que, dans leur orgueil, ils ont cru qu’on n’oserait pas les toucher ; parce qu’ils ont voulu se créer une situation privilégiée dans le Parti.

Tolérera-t-on, dans le Parti, des grands seigneurs jouissant de privilèges et des paysans qui n’en ont pas ? Est-ce que nous, bolchéviks, qui avons extirpé la noblesse avec ses racines, allons maintenant la rétablir dans notre Parti ? (..).

Si l’opposition veut rester dans le Parti, qu’elle se soumette à la volonté du Parti, à ses lois, à ses instructions, sans réserve et sans équivoque. Si elle ne le veut pas, qu’elle s’en aille là où elle pourra être plus à son aise (..).

On demande quelles sont les conditions. Il n’y en a qu’une : l’opposition doit désarmer entièrement et complètement tant sous le rapport de l’idéologie que de l’organisation (..). Qu’ils fassent ainsi ou s’en aillent du Parti. Et s’ils ne s’en vont pas, nous les mettrons dehors ».

« L’opposition a organisé une fraction, et l’a transformée en un parti au sein de notre Parti bolchévik. Les traditions bolchéviks autorisent-elles un pareille ignominie ? Comment peut-on parler des traditions bolchéviks et admettre en même temps la scission dans le Parti, la formation dans son sein d’un autre parti antibolchévik ?

Ensuite, l’opposition a organisé une imprimerie illégale en s’alliant à des intellectuels bourgeois qui, à leur tour, étaient liés à des gardes blancs avérés. Comment ose-t-on parler des traditions du bolchévisme si l’on tolère un ignominie qui va jusqu’à la trahison directe du Parti et du pouvoir soviétique ?

Enfin, l’opposition a organisé une manifestation dirigée contre le Parti et en faisant appel à des éléments non prolétariens. Comment peut-on parler de traditions bolchéviks quand on fait appel à la rue contre son Parti, contre le pouvoir soviétique ?

A-t-on jamais entendu dire que les traditions bolchéviks autorisent de telles ignominies qui touchent directement à la contre-révolution ? N’est-il pas clair que le camarade Kamenev ne fait valoir ses traditions que pour cacher sa rupture avec elles au nom des intérêts de son groupe antibolchévik ?

Cet appel à la rue n’a rien apporté à l’opposition, car il n’a attiré qu’un groupe insignifiant. Ce n’est pas la faute de l’opposition, c’est son malheur. Que serait-il advenu si l’opposition avait été plus forte ?

L’appel à la rue se serait transformé en une émeute directe contre le pouvoir soviétique. Est-il difficile de comprendre qu’en réalité cette tentative de l’opposition ne se distingue en rien de la fameuse tentative des socialistes-révolutionnaires de gauche en 1918 ? ».

Staline va alors théoriser ce qu’est le trotskysme.

« En quoi consiste l’essence du trotskysme ?

L’essence du trotskysme consiste, avant tout, dans la négation de la possibilité d’édifier le socialisme en URSS par les forces de la classe ouvrière et de la paysannerie dans notre pays.

Qu’est-ce que cela signifie ? C’est que si, dans un proche avenir, le secours de la révolution mondiale victorieuse n’arrive pas, nous devrons capituler devant la bourgeoisie et déblayer la route à la République démocratique bourgeoise.

Ainsi donc, nous avons là une négation bourgeoise de la possibilité d’édifier le socialisme dans notre pays, négation masquée par une phrase révolutionnaire sur la victoire de la révolution mondiale.

Peut-on, avec de telles conceptions, provoquer chez les masses innombrables de la classe ouvrière, l’enthousiasme au travail, l’émulation socialiste, un vaste travail de choc, une offensive largement déployée contre les éléments capitalistes ?

Il est clair que non. Il serait absurde de croire que notre classe ouvrière, qui a fait trois révolutions, développerait l’enthousiasme au travail et un vaste travail de choc, à seule fin d’engraisser le terrain pour le capitalisme. Notre classe ouvrière développe son élan au travail, non pour le capitalisme, mais pour enterrer définitivement le capitalisme et édifier le socialisme en U.R.S.S.. O

tez-lui la certitude de la possibilité d’édifier le socialisme, et vous détruirez tout terrain pour l’émulation, pour l’élan au travail, pour le travail de choc.

De là la conclusion : pour provoquer chez la classe ouvrière l’élan au travail et l’émulation, et organiser une offensive largement déployée, il fallait avant tout enterrer la théorie bourgeoise du trotskysme sur l’impossibilité d’édifier le socialisme dans notre pays.

L’essence du trotskysme consiste, en second lieu, dans la négation de la possibilité de faire participer les masses essentielles de la paysannerie à l’édification socialiste à la campagne.

Qu’est-ce que cela signifie ? C’est que la classe ouvrière n’est pas en mesure d’entraîner derrière elle la paysannerie afin d’aiguiller les exploitations paysannes individuelles dans la voie de la collectivisation ; que si, dans un proche avenir, la victoire de la révolution mondiale n’arrive pas au secours de la classe ouvrière, la paysannerie rétablira l’ancien ordre de choses bourgeois.

Ainsi donc, nous sommes là en présence d’une négation bourgeoise des forces et possibilités de la dictature prolétarienne pour mener la paysannerie au socialisme, négation masquée sous des phrases « révolutionnaires » sur la victoire de la révolution mondiale.

Peut-on, avec de telles conceptions, entraîner les masses paysannes dans le mouvement kolkhozien, organiser un mouvement kolkhozien de masse, organiser la liquidation des koulaks en tant que classe ? Il est clair que non.

De là la conclusion : pour organiser un mouvement kolkhozien de masse de la paysannerie et liquider la classe des koulaks, il fallait, avant tout, enterrer la théorie bourgeoise du trotskysme sur l’impossibilité d’associer les masses travailleuses de la paysannerie au socialisme.

L’essence du trotskysme consiste, enfin, à nier la nécessité d’une discipline de fer dans le Parti, à reconnaître la liberté des groupements de fraction dans le Parti, à reconnaître la nécessité de former un parti trotskyste.

Pour le trotskysme, le Parti Communiste de l’U.R.S.S. ne doit pas être un parti de combat, unique et cohérent, mais une réunion de groupes et de fractions avec leurs centres, avec leur presse, etc.

Or, qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie proclamer la liberté des fractions politiques dans le Parti. Cela signifie qu’après la liberté des groupements politiques dans le Parti, doit venir la liberté des partis politiques dans le pays, c’est-à-dire la démocratie bourgeoise.

Nous avons donc, ici, la reconnaissance de la liberté des groupements fractionnels dans le Parti, jusque et y compris l’admission des partis politiques dans le pays de la dictature du prolétariat, reconnaissance masquée par une phrase sur la « démocratie intérieure du Parti », sur l’« amélioration du régime » dans le Parti.

Que la liberté des chicaneries fractionnelles, des groupes intellectuels ne soit pas encore la démocratie intérieure du Parti ; que l’ample autocritique réalisée par le Parti et l’activité prodigieuse des masses d’adhérents du Parti soient une manifestation de la véritable et authentique démocratie du Parti, cela il n’est pas donné au trotskysme de le comprendre.

Peut-on, avec de telles conceptions sur le Parti, assurer une discipline de fer dans le Parti, assurer l’unité de fer du Parti, nécessaire au succès de la lutte contre les ennemis de classe ? Il est clair que non.

De là la conclusion : pour assurer l’unité de fer du Parti et la discipline prolétarienne dans son sein, il fallait avant tout enterrer la théorie du trotskysme en matière d’organisation.

Capitulation en fait, comme contenu, phrases « de gauche » et gestes d’aventurisme « révolutionnaire », comme forme couvrant et exaltant l’esprit de capitulation, qui est son contenu, telle est l’essence du trotskysme.

Cette dualité du trotskysme reflète la situation double de la petite bourgeoisie citadine en voie de se ruiner, qui ne peut souffrir le « régime » de la dictature du prolétariat et s’efforce, ou bien de sauter « d’un coup » dans le socialisme, pour échapper à la ruine (d’où l’esprit d’aventure et l’hystérie en politique), ou bien, si cela est impossible, de consentir n’importe quelle concession au capitalisme (d’où l’esprit de capitulation, en politique).

C’est cette dualité du trotskysme qui explique le fait que ses attaques « enragées » soi-disant contre les déviationnistes de droite, le trotskysme les couronne habituellement par un bloc avec eux, comme avec des capitulards sans masque ».
Le trotskysme est compris comme thèse politique, mais également comme mouvement ayant cristallisé l’opposition au communisme en U.R.S.S..

« Certains bolchéviks pensent que le trotskysme est une fraction du communisme, laquelle, il est vrai, se trompe, fait pas mal de bêtises, est parfois même antisoviétique, mais est quand même une fraction du communisme. De là un certain libéralisme à l’égard des trotskystes et des gens d’esprit trotskyste.

Il est à peine besoin de démontrer qu’un tel point de vue sur le trotskysme est profondément erroné et nuisible. En réalité, le trotskysme a, depuis longtemps déjà, cessé d’être une fraction du communisme. En réalité, le trotskysme est un détachement d’avant-garde de la bourgeoisie contre-révolutionnaire, qui mène la lutte contre le communisme, contre le pouvoir des Soviets, contre l’édification du socialisme en U.R.S.S..

Qui a donné à la bourgeoisie contre-révolutionnaire une arme spirituelle contre le bolchévisme, sous forme de thèse sur l’impossibilité de construire le socialisme dans notre pays, sur la dégénérescence inéluctable des bolchéviks, etc. ?

Cette arme, le trotskysme la lui a donnée. On ne peut considérer comme un hasard le fait que tous les groupements anti-soviétiques en U.R.S.S., dans leurs tentatives de justifier l’inévitabilité de la lutte contre le pouvoir des soviets, aient invoqué la thèse trotskyste que l’on connaît sur l’impossibilité de construire le socialisme dans notre pays, sur la dégénérescence inéluctable du pouvoir des Soviets, sur le retour probable au capitalisme.

Qui a donné à la bourgeoisie contre-révolutionnaire de l’U.R.S.S. une arme tactique sous la forme de tentatives d’actions déclarées contre le pouvoir des Soviets ? Cette arme, les trotskystes la lui ont donnée, qui tentèrent d’organiser des démonstrations antisoviétiques à Moscou et Léningrad le 7 novembre 1927.

C’est un fait que les manifestations antisoviétiques des trotskystes ont redonné du courage à la bourgeoisie et déclenché le sabotage des spécialistes bourgeois.

Qui a donné à la bourgeoisie contre-révolutionnaire une arme d’organisation sous forme de tentative de constituer des organisations antisoviétiques clandestines ? Cette arme, les trotskystes la lui ont donnée, qui organisèrent leur propre groupe illégal antibolchévik. C’est un fait que l’action antisoviétique clandestine des trotskystes a facilité la cristallisation organique de groupements antisoviétiques en U.R.S.S..

Le trotskysme est un détachement d’avant-garde de la bourgeoisie contre-révolutionnaire.

Voilà pourquoi le libéralisme à l’égard du trotskysme, bien que brisé et camouflé, est de l’inconséquence confinant au crime, à la trahison envers la classe ouvrière ».

5.La construction du socialisme en URSS
(1929-1937)
a)la liquidation des paysans riches (1929-1932)

Les années précédant 1930 auront été celles de dures luttes au sein du Parti pour la victoire de la ligne favorable à la construction du socialisme. Un premier pas est fait en avril 1929 au XVIème Congrès, où est pour la première fois discuté du plan quinquennal, qui fut accepté.

Staline met également en avant une thèse déjà mise en avant en octobre 1928, celle de la possibilité de la restauration du capitalisme en URSS si l’on ne prend pas garde au danger droitier : 

« Dans les conditions du développement soviétique, alors que le capitalisme est déjà renversé, bien que ses racines ne soient pas encore arrachées, la déviation de droite, dans le communisme, est une tendance, un penchant qu’ont une partie des communistes - penchant imprécis, il est vrai, et dont ils n’ont peut-être pas encore pris conscience, mais penchant tout de même - à s’écarter de la ligne générale de notre Parti vers l’idéologie bourgeoise.

Lorsque certains de nos milieux communistes tentent de tirer notre Parti en arrière par rapport aux résolutions du XVème congrès, en niant la nécessité d’une offensive contre les éléments capitalistes de la campagne ; ou qu’ils exigent la réduction de notre industrie, estimant que le rythme actuel de son développement rapide est néfaste pour le pays ;

ou qu’ils nient l’utilité des affectations de fonds aux kolkhozes et aux sovkhozes, estimant que c’est de l’argent jeté par la fenêtre ; ou qu’ils nient l’utilité de la lutte contre le bureaucratisme sur la base de l’autocritique, croyant que l’autocritique ébranle notre appareil ;

ou qu’ils exigent le relâchement du monopole du commerce extérieur, etc. etc., cela veut dire qu’il y a dans les rangs de notre Parti des gens qui tentent, peut-être sans s’en rendre compte eux-mêmes, d’adapter l’œuvre de notre construction socialiste aux goûts et aux besoins de la bourgeoisie « soviétique ».

La victoire de la déviation de droite dans notre Parti signifierait un renforcement énorme des éléments capitalistes dans notre pays.

Or, que signifierait le renforcement des éléments capitalistes dans notre pays ? Cela signifierait l’affaiblissement de la dictature du prolétariat et l’accroissement des chances de restauration du capitalisme.

Ainsi donc, la victoire de la déviation de droite dans notre Parti signifierait l’accroissement des conditions nécessaires à la restauration du capitalisme dans notre pays.

Existe-t-il chez nous, dans notre pays des Soviets, des conditions rendant possible la restauration du capitalisme ? Oui, elles existent. Cela vous paraître peut-être étrange, mais c’est un fait ».

Staline avait expliqué que le danger, tel que Lénine l’avait expliqué, est la petite production marchande, urbaine et paysanne. L’économie n’est pas au niveau du politique, car celle-ci est encore capitaliste pour un pouvoir déjà socialiste. Il s’agit donc de « transférer l’économie du pays, y compris l’agriculture, sur une nouvelle base technique, celle de la production moderne » (Lénine).

Lénine avait dans de nombreux textes mis en avant l’importance du caractère organisé du capitalisme, qui devait être en URSS d’Etat, au service du développement socialiste.

« Cette fabrique qui à d’aucun semble être un épouvantail est précisément cette forme supérieure de la coopération capitaliste, qui a groupé, discipliné le prolétariat, lui a enseigné l’organisation, l’a mis à la tête de toutes les autres catégories de la population laborieuse et exploitée.

C’est le marxisme, idéologie du prolétariat éduqué par le capitalisme, qui a enseigné et enseigne aux intellectuels inconsistants la différence entre le côté exploiteur de la fabrique (discipline basée sur la crainte de mourir de faim) et son côté organisateur (discipline basée sur le travail en commun, résultant d’une technique hautement développée) ».

Staline reprend cette thématique en avril 1929, dans un discours intitulé « De la déviation de droite dans le Parti Communiste [bolchévik] de l’U.R.S.S.». Il souligne la nécessité de liquider les éléments capitalistes de l’économie, et que le Parti comprenne la tâche.
« Qu’ont montré les difficultés du stockage du blé ?

Elles ont montré que le koulak veille, que le koulak grandit, qu’il sape sournoisement la politique du pouvoir des Soviets, tandis que nos organisations du Parti, notre appareil soviétique et nos organisations coopératives, en tout cas un partie d’entre eux, ou bien ne voient pas l’ennemi, ou bien s’accommodent à lui au lieu de le combattre (..).

Qu’est-ce que la résistance des éléments capitalistes de la ville et des campagnes à l’offensive du socialisme ? C’est un regroupement des forces des ennemis de classe du prolétariat, ayant pour but de défendre l’ancien ordre des choses contre le nouveau.

Il n’est pas difficile de comprendre que ces circonstances ne peuvent manquer de provoquer une aggravation de la lutte des classes. Mais pour briser la résistance des ennemis de classe et déblayer le chemin de la progression du socialisme, il faut, en plus de toutes autres choses, affiner toutes nos organisations, les purifier du bureaucratisme, améliorer leurs cadres et mobiliser les masses innombrables de la classe ouvrière et des couches travailleuses de la campagne contre les éléments capitalistes de la ville et des campagnes ».

Staline critique principalement Boukharine comme le théoricien du refus de la collectivisation des campagnes, refus s’associant à diverses autres déviations (politique conciliatrice avec la social-démocratie au niveau international, etc.). La ligne déviationniste liquidée, la collectivisation des campagnes et la liquidation des koulaks en tant que classe sont réalisées.

Dans le texte « Le vertige du succès », Staline critiquera notamment la trop grande rapidité de la collectivisation, car celle-ci ne doit jamais être imposée, mais allée au rythme des masses.

Et, alors que le plan quinquennal permet un formidable accroissement de la production industrielle, Staline met bien en avant l’internationalisme prolétarien dans « Les tâches des dirigeants de l’industrie » :

« Mais nous avons d’autres obligations, plus graves et plus importantes. Celles que nous devons remplir envers le prolétariat mondial.

Elles coïncident avec les obligations du premier genre [concernant la construction de l’économie socialiste]. Mais nous les plaçons plus haut. La classe ouvrière de l’U.R.S.S. est une partie de la classe ouvrière mondiale. Nous avons vaincu non seulement par les efforts de la classe ouvrière de l’U.R.S.S., mais aussi grâce à l’appui de la classe ouvrière mondiale.

Sans cet appui, on nous aurait depuis longtemps déchiquetés. On dit que notre pays est la brigade de choc du prolétariat de tous les pays. C’est bien dit. Mais cela nous impose les obligations les plus sérieuses. Au nom de quoi le prolétariat international nous soutient-il ? Qu’est-ce qui nous a valu ce soutien ?

C’est que nous nous sommes jetés les premiers dans la bataille contre le capitalisme ; que nous avons les premiers instauré le pouvoir ouvrier ; que nous nous sommes mis les premiers à bâtir le socialisme. C’est que nous travaillons à une œuvre qui, en cas de succès, bouleversera le monde entier et affranchira toute la classe ouvrière. Et que faut-il pour réussir ? Liquider notre retard, développer des rythmes élevés, bolchéviks, de construction.

Nous devons marcher de l’avant de façon que la classe ouvrière du monde entier, en nous regardant, puisse dire : Le voilà mon détachement d’avant-garde, la voilà ma brigade de choc, le voilà mon pouvoir ouvrier, la voilà ma patrie ; ils travaillent à leur œuvre, à notre œuvre à nous, et ils y travaillent bien ; soutenons-les contre les capitalistes et attisons les flammes de la révolution mondiale.

Devons-nous justifier les espoirs de la classe ouvrière mondiale, devons-nous remplir nos obligations envers elle ? Oui, nous le devons, si nous ne voulons pas définitivement nous couvrir de honte ».

Staline organise le développement de l’économie socialiste, et souligne les erreurs.

« Chaque léniniste sait, si tant est qu’il soit un léniniste véritable, que le nivellement des besoins et de la vie personnelle est une stupidité petite-bourgeoise réactionnaire, digne de quelque secte primitive d’ascètes, mais non d’une société socialiste, organisée à la manière marxiste. On ne saurait en effet exiger des hommes qu’ils aient tous les mêmes besoins et les mêmes goûts, que dans leur vie personnelle ils adoptent un standard unique (..).

En déduire [des principes marxistes] que d’après le plan des marxistes, tous doivent porter le même costume et prendre des repas identiques, en même quantité, - c’est dire des platitudes et calomnier le marxisme ».

 

b)Le socialisme (1933-1939)

Il serait faux de croire que les succès du socialisme aient affaibli la lutte de classe. Ainsi, le 1er décembre 1934, Kirov, le responsable du Parti à Léningrad, le second de Staline, se fait assassiner d’un coup de revolver par un membre d’un groupe clandestin.

Le Parti mène alors une grande politique de répression, pour briser les forces anti-soviétiques, ce qui amènera la liquidation de Kamenev et Zinoviev lors des fameux « procès de Moscou ».

Les événements sont compris comme une épreuve de force, et la répression dépasse le cadre des responsables.

Au lieu d’isoler les coupables et de neutraliser les « centristes », la politique menée est brutale et souvent aveugle. Staline critiquera fortement cette politique dans le document « Sur les manques du travail du Parti » ; il attaque la répression aveugle, incapable de prendre en compte l’évolution individuelle, ce qui aboutit à des « hontes » et à une politique ne comprenant que « deux extrêmes ».

Mais, en pratique, cela n’a pas d’effet réels, car l’ensemble de ses critiques étaient faussées par une erreur générale.

Le Parti avait en effet décidé en 1935 de modifier la Constitution de 1924 ; le projet de constitution sera adopté en 1936. Staline explique dans le document « Sur le projet de constitution de l’U.R.S.S. » que :

«Maintenant que le fascisme vomit ses flots troubles sur le mouvement socialiste de la classe ouvrière et traîne dans la boue les aspirations démocratiques des meilleurs hommes du monde civilisé, la nouvelle Constitution de l’U.R.S.S. dresse contre le fascisme un réquisitoire témoignant que le socialisme et la démocratie sont invincibles. La nouvelle Constitution de l’U.R.S.S. sera une aide morale et un soutien effectif pour tous ceux qui mènent actuellement la lutte contre la barbarie fasciste.

Pour les peuples de l’U.R.S.S., l’importance de la nouvelle Constitution est encore plus grande. Alors que pour les peuples des pays capitalistes, la Constitution de l’U.R.S.S. sera un programme d’action, pour les peuples de l’U.R.S.S., elle est comme le bilan de leur lutte, le bilan de leurs victoires sur le front de la libération de l’humanité (..).

C’est ce qui affermit la foi que nous avons en nos forces et nous mobilise pour une lutte nouvelle, pour remporter de nouvelles victoires dans la voie du communisme ».

Mais le document contient des erreurs fondamentales. Il y est ainsi affirmé que, dans le socialisme, il n’y a plus d’antagonisme de classes.

Or, cela est faux : les anciennes classes sont renversées, mais pas anéanties ; l’influence politique et idéologique de la bourgeoisie existe encore. Il ne suffisait pas de collectiviser les campagnes pour faire disparaître les antagonismes de lasse ; en « oubliant » ces contradictions Staline s’est éloigné des principes de la dialectique marxiste.

C’est-à-dire, comme l’ont dit des camarades de Turquie, que

« lorsqu’on parle de lutte de classe, on pense à une lutte de classes en conflit, l’une contre l’autre, par exemple le prolétariat contre la bourgeoisie et la bourgeoisie contre le prolétariat, et ce dans tous les domaines (politiquement, idéologiquement, culturellement, économiquement, militairement, etc.).

De la même manière on pense, en parlant de l’abolition des classes, de leur abolition dans tous les domaines. Abolir la propriété privée des moyens de production des classes exploiteuses ne signifie pas les abolir complètement en tant que classe ».

Staline répétera cette erreur théorique, qui va conditionner la politique du Parti :

« Ce qu’il y a de particulier dans la société soviétique de notre époque, à la différence de toute société capitaliste, c’est qu’elle n’a plus en soin sein de classes antagonistes, ennemies ; que les classes exploiteuses ont été liquidées et que les ouvriers, les paysans et les intellectuels vivent et travaillent en collaboration fraternelle.

Alors que la société capitaliste est déchirée par des antagonismes inconciliables entre ouvriers et capitalistes, entre paysans et propriétaires fonciers, ce qui conduit à l’instabilité de sa situation intérieure,- la société soviétique, libérée du joug de l’exploitation, ignore ces antagonismes ; elle est affranchie des conflits de classes et offre l’image d’une collaboration fraternelle entre ouvriers, paysans et intellectuels ».

Cette conception mécanique et anti-dialectique aboutit à la passivité politique, à la croyance en le développement des forces productives comme minimum suffisant pour arriver au communisme, une fois le passage au socialisme établi. Alors qu’auparavant Staline était conscient du danger de restauration, à partir de la collectivisation des campagnes et de l’industrialisation il nie ce danger.

Cette mauvaise analyse de l’économie et de la liaison entre infrastructure et superstructure trouve sa source dans une conception mécanique de la dialectique. La lutte des contraires est saisie, mais pas leur unité, ce qui aboutit à une mauvaise résolution des conflits, par négation des différences entre contradiction antagonique et non antagonique, entre contradiction principale et contradiction secondaire.

Cette négation se retrouve dans le document de Septembre 1938 : « Le matérialisme historique et le matérialisme dialectique », qui résume les principes du marxisme-léninisme.

A part cet oubli fondamental, que Mao-Tsé-Toung réparera (notamment « de la contradiction »), les définitions sont justes et ce document reste un classique (d’où sa publication ici).

Mais ils faut bien comprendre le sens de cet oubli, et saisir sa signification dans le domaine de l’économie ; Staline n’a
pas vu les contradictions entre les forces productives et les rapports de production.

6.La victoire contre le nazisme, les années 1950 et le triomphe du révisionnisme
a)la grande guerre patriotique (1939-1941-1945)

La propagande anti-communiste a toujours affirmé que Staline avait été un mauvais théoricien et un mauvais chef militaire. Cela ne tient pas si l’on étudie précisément les événements de la « grande guerre patriotique ».

En effet, Staline avait déjà été à l’origine de nombreux plans militaires lors de la guerre civile, notamment de celui contre le général blanc Dénikine en 1919 (plan qui fut qui plus est préféré à celui de Trotsky).

L’armée rouge avait qui plus est mené un très important travail théorique concernant les plans militaires.

Il est certain que Staline avait considéré que l’invasion des forces nazies se produirait plus tard, et que cela a été une erreur quasiment fatale.

Mais il est faux de dire que le danger de guerre avait été sous-estimé. Le pacte Molotov-Ribbentropp (et non pas Hitler-Staline) avait été fait pour gagner du temps, et empêcher que l’U.R.S.S. se retrouve seule protagoniste face à l’Allemagne nazie (et le Japon).

L’U.R.S.S. développa considérablement son armement entre 1939 et 1941, notamment au niveau des chars. La guerre a toujours été considérée comme inévitable, comme en témoigne ces propos du commissaire Mekhlis, chef du département politique de l’armée rouge, en 1939 au 18ème congrès du Parti :

« Pour éliminer le danger d’une intervention capitaliste étrangère, dit l’Histoire du P.C.U.S., il faut briser l’encerclement capitalise.

Le temps n’est pas éloigné, camarades, où notre armée, qui, par son idéologie prévalante, constitue une armée internationale, saura, pour riposter aux attaques insolents de l’ennemi, aider les ouvriers des pays agresseurs à s’émanciper du joug fasciste, du joug de la servitude capitaliste, et brisera cet encerclement capitaliste dont parlait le camarade Staline ».

Lors de l’invasion, Staline resta en arrière-plan, afin de se conserver comme « symbole ». Molotov fit un appel immédiat à la résistance, et Staline ne prit la parole que le 3 juillet 1941, pour faire un appel au profil très bas à ses « frères et sœurs ».

Staline joua alors un rôle militaire très important, consistant à coordonner les différents maréchaux et généraux. Un accent particulier fut mis sur la guerre de partisans, qui n’avait pas été préparé mais se développa rapidement.

La ligne générale fut celle de la lutte de libération nationale, sans pour autant que cette ligne correcte fut clairement explicitée. Ainsi, au « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » de La Pravda succéda pendant la guerre un « Mort à l’envahisseur allemand ! », et la propagande s’efforça de faire ressortir la question nationale (comme le film « Alexandre Nevski », retraçant la lutte des Russes contre les chevaliers teutoniques, le montre).

La guerre fut appelée « seconde grande guerre patriotique », en référence à la première datant de 1812.
Néanmoins, il faut bien constater que le Parti a toujours été au poste de commandement, et qu’aucune déviation militariste n’a eu lieu. Staline a donc bien contribué à la victoire de l’U.R.S.S. sur le nazisme, et a joué le rôle de chef de l’armée rouge.

b)la reconstruction (1945-1953)

De fait, la vie démocratique dans le Parti a repris dès la fin de la guerre, progressivement. Une large critique fut faite contre la routine administrative, allant contre les Soviets et contre le Parti.

Le Parti avait désormais 6 millions d’adhérents, dont la moitié l’avait rejoint pendant la guerre, avec le manque de formation que cela implique.
Qui plus est, les nazis avaient mené un grand combat idéologique dans les zones qu’ils avaient contrôlés, un travail dut également être fait à ce niveau.

La guerre impérialiste avait considérablement affaibli économiquement l’Union Soviétique, qui entame donc une reconstruction sur la base des plans quinquennaux. Cette reconstruction se fait en liaison avec celle des démocraties populaires des pays de l’Est européen.

Le concept de « démocratie populaire » a été formulé par Dimitrov, et contient en son sein une déviation réformiste, dont un écho ambigu se fait sentir dans le discours de Staline le 14 octobre 1952 au 19ème congrès du Parti.
Ce congrès est celui du changement de nom, le « PCUS[b] » devenant le « PCUS », puisque le but est le communisme désormais, le plus haut stade du socialisme étant atteint selon Staline. Celui-ci avait publié en 1951 un texte important, « Les problèmes économiques du socialisme en U.R.S.S. », où il tentait d’expliciter les erreurs qu’il était (encore) possible de faire.
Il faut bien noter que Staline met plusieurs points d’importance en avant.
Tout d’abord, il met en avant le fait qu’il y ait des déséquilibres dans le développement de l’économie socialiste, mais les explique par les problèmes d’adéquation entre la planification et l’économie.

Il donne une solution économiste, qualifiée par les maoïstes de « théorie des forces productives », et consistant à défendre le passage au communisme par simple élévation permanente du niveau matériel :

« Existe-t-il une loi économique fondamentale du socialisme ? Oui, elle existe. Quels sont les principaux traits et exigences de cette loi ?

Les principaux traits et exigences de la loi économique fondamentale du socialisme pourraient être formulés à peu près ainsi:  assurer au maximum la satisfaction des besoins matériels et culturels sans cesse croissants de toute la société, en développant et en perfectionnant toujours la production socialiste sur la base d’une technique supérieure ».

Au niveau politique, Staline évite néanmoins les erreurs, et est conscient des nombreux problèmes.

Il souligne ainsi dans tout un chapitre que les guerres impérialistes continueront d’avoir lieu :

« Certains camarades affirment qu’étant donné les nouvelles conditions internationales, après la Seconde Guerre mondiale, les guerres entre pays capitalistes ne sont plus inévitables.

Ils estiment que les contradictions entre le camp du socialisme et celui du capitalisme sont plus fortes que les contradictions entre pays capitalistes ; que les Etats-Unis d’Amérique se sont suffisamment soumis les autres pays capitalistes pour les empêcher de se faire la guerre et de s’affaiblir mutuellement ; que les hommes avancés du capitalisme sont assez instruits par l’expérience des deux guerres mondiales, qui ont porté un sérieux préjudice à l’ensemble du monde capitaliste, pour se permettre d’entraîner à nouveau les pays capitalistes dans une guerre entre eux ; que, de ce fait, les guerres entre pays capitalistes ne sont plus inévitables.
Ces camarades se trompent (…).

On dit que les contradictions entre capitalisme et socialisme sont plus fortes que celles existant entre les pays capitalistes.

Théoriquement, c’est juste, bien sûr. Pas seulement aujourd’hui ; c’était juste aussi à la veille de la Seconde Guerre mondiale. C’est ce que comprenaient plus ou moins les dirigeants des pays capitalistes. Et cependant, la Seconde Guerre mondiale n’a pas commencé par la guerre contre l’U.R.S.S., mais par une guerre entre pays capitalistes.

Pourquoi ? Parce que, d’abord, la guerre contre l’U.R.S.S., pays du socialisme, est plus dangereuse pour le capitalisme que la guerre entre pays capitalistes. Car si la guerre entre pays capitalistes pose seulement la question de la suprématie de tels pays capitalistes sur tels autres, la guerre contre l’U.R.S.S. doit nécessairement poser la question de l’existence même du capitalisme.

Parce que, en second lieu, les capitalistes, bien qu’ils proclament, aux fins de « propagande », l’agressivité de l’Union soviétique, n’y croient pas eux-mêmes, puisqu’ils tiennent compte de la politique de paix de l’Union soviétique et savent que cette dernière n’attaquera pas d’elle-même les pays capitalistes (…).

Il s’ensuit donc que l’inévitabilité des guerres entre pays capitalistes reste entière.

On dit qu’il faut considérer comme périmée la thèse de Lénine selon laquelle l’impérialisme engendre inévitablement les guerres, puisque de puissantes forces populaires ont surgi maintenant, qui défendent la paix contre une nouvelle guerre mondiale. Cela est faux.

Le mouvement actuel pour la paix se propose d’entraîner les masses populaires dans la lutte pour le maintien de la paix, pour conjurer une nouvelle guerre mondiale. Par conséquent, il ne vise pas à renverser le capitalisme et à établir le socialisme,- il se borne à des buts démocratiques de lute pour le maintien de la paix.

A cet égard, le mouvement actuel pour le maintien de la paix se distingue du mouvement de l’époque de la Première Guerre mondiale, lequel, visant à transformer la guerre impérialiste en guerre civile, allait plus loin et poursuivait des buts socialistes.

Il se peut que, les circonstances aidant, la lutte pour la paix évolue çà et là vers la lutte pour le socialisme, mais ce ne sera plus le mouvement actuel en faveur de la paix, mais un mouvement pour renverser le capitalisme.

Le plus probable, c’est que le mouvement actuel pour la paix, c’est-à-dire le mouvement pour le maintien de la paix, contribuera, en cas de succès, à conjurer une guerre donnée, à l’ajourner temporairement, à maintenir temporairement une paix donnée, à faire démissionner le gouvernement belliciste et à y substituer un autre gouvernement, disposé à maintenir provisoirement la paix. Cela est bien, naturellement.

C’est même très bien. Mais cela ne suffit pas pour supprimer les guerres inévitables en général entre pays capitalistes. Cela ne suffit pas, car malgré tous ces succès du mouvement de la paix, l’impérialisme demeure debout, reste en vigueur. Par suite, l’inévitabilité des guerres reste également entière.

Pour supprimer le caractère inévitable des guerres, il faut détruire l’impérialisme ».

Un autre chapitre est consacré à « la portée internationale d’un manuel marxiste d’économie politique ». Staline y explique qu’un tel manuel contribuerait à aider les communistes de tous les pays à comprendre l’expérience bolchévik, particulièrement les jeunes venus aux Partis.
Mais Staline dit aussi :

« Du reste, étant donné le niveau insuffisant de formation marxiste de la plupart des partis communistes des pays à l’étranger, ce manuel pourrait être d’une grande utilité aussi pour les cadres communistes déjà âgés de ces pays ».

Ce qui a le mérite d’être on ne peut plus clair, et se montrera très vrai dès la mort de Staline, le 5 mars 1953.

c)le triomphe du révisionnisme (1953-1956)

A la mort de Staline, les choses vont très vite. Les différents services des commissaires politiques sont dissous ; le service de sécurité de l’Etat est démantelé, son chef Béria, partisan de Staline, exécuté ; en 1954 le KGB est fondé.

De fait, une bataille s’est lancé au sein du Parti entre deux fractions.

La première, qui a pris le pouvoir dès la mort de Staline, c’est celle qui s’organise autour de Khroutchev, partisan zélé de Staline qui propose d’un coup la « critique du culte de la personnalité », qui va lancer la déstalinisation au XXème congrès du Parti.

Représentant de la bourgeoisie soviétique qui s’est développée dans le Parti, il organise la liquidation des kolkhozes et le développement du capitalisme dès le pouvoir entre les mains de sa fraction.
La seconde, c’est celle organisée autour de Viatcheslav Molotov, Lazar Kaganovitch et Malenkov, qui ne veut pas de révision du marxisme-léninisme. Ils seront définitivement écartés en 1957.

Marxistes-léninistes sérieux et conséquents, ils ont toujours fait la différence entre Staline en tant qu’individu et le symbole destiné aux masses. Kaganovitch parlait ainsi du « camarade Staline et de la direction stalinienne homogène ».

Le terme « stalinien » ne signifiait pas « de Staline », mais : « de la période de Staline ». S’il y a eu des excès dans cette propagande passant par l’image d’un individu, et il est évident que la bourgeoisie au sein du Parti en a profité, il faut tout de même noter certains faits assez démonstratifs concernant Staline lui-même. Lorsque fut créé le corps de la garde en octobre 1941, il intervint pour retirer de leur devise les mots « Pour Staline ».

Il refusa le grade de « généralissime » et le titre de « héros de l’Union Soviétique » tant que la victoire sur l’Allemagne ne fut pas effective. Il participait lui-même aux ovations lors de ses discours, et a toujours souligné que « le Parti l’avait façonné à son image ».

De fait, le discours sur le culte de la personnalité n’était qu’un prétexte justifiant la prise du pouvoir de la bourgeoisie soviétique, qui s’est développé idéologiquemet à cause des erreurs du Parti de Staline. Cela est d’autant plus flagrant quand on sait que Khroutchev était l’un des plus grands zélateurs de Staline.

De fait, comme le dit Mao,

« Au cours de l’année écoulée [soit 1956], plusieurs grands orages ont éclaté sur la scène du monde. Le XXème Congrès du Parti Communiste de l’Union Soviétique a lancé une violente attaque contre Staline ; puis, les impérialistes ont mené deux vastes campagnes anti-communistes, et deux débats orageux ont eu lieu au sein du mouvement communiste international.

Certains partis d’Europe et d’Amérique ont été beaucoup affectés par ces événements et ont subi des pertes considérables ; les partis des pays d’Orient ont été moins touchés et leurs pertes ne sont pas aussi graves.

Depuis le XXème Congrès du Parti Communiste de l’Union Soviétique, certains qui avaient soutenus très activement Staline sont maintenant non moins actifs dans leurs attaques contre lui. A mon avis, ils laissent de côté le marxisme-léninisme, ils n’ont pas fait l’analyse du problème et ignorent la morale révolutionnaire. Le marxisme-léninisme implique aussi la morale révolutionnaire du prolétariat. Naguère, vous déployiez tant de zèle pour soutenir Staline qu’il faudrait tout de même, à présent, avancer quelques raisons pour justifier votre revirement ! Mais, sans donner la moindre explication, vous prenez tout à coup un virage de 180 degrés, comme si vous n’aviez jamais soutenu Staline, et pourtant, vous étiez bien ses partisans fervents. La question de Staline concerne l’ensemble du mouvement communiste international et les partis de tous les pays.
Pour ce qui est du XXème Congrès du Parti Communiste de l’Union Soviétique, l’écrasante majorité des cadres de notre Parti en sont mécontents. C’est là un sentiment naturel, une réaction normale (..).
A propos de la dialectique, Lénine disait : « On peut brièvement définir la dialectique comme la théorie de l’unité des contraires. Par là on saisira le noyau de la dialectique, mais cela exige des explications et un développement ».

Explications et développement, c’est là une tâche qui nous incombe. Il faut fournir des explications, nous en avons donné trop peu jusqu’ici. Il faut aussi assurer le développement ; nous qui avons accumulé une riche expérience au cours de la révolution, nous devons développer cette théorie.

Lénine disait par ailleurs : « L’unité (coïncidence, identité, équipollence) des contraires est conditionnée, temporaire, passagère, relative. La lutte des contraires qui s’excluent mutuellement est absolue, de même que l’évolution, de même que le mouvement ». Partant de ce point de vue, nous avons formulé le principe « Que cent fleurs s’épanouissent, que cent écoles rivalisent ».

La vérité n’existe qu’au regard de l’erreur et se développe dans la lutte contre elle. Il en est de même pour le beau et le laid, pour le bien et le mal.

En effet tout acte utile, tout homme de bien n’existent qu’au regard des actes blâmables, des mauvaises gens et se développent dans la lutte contre eux. Bref, les fleurs odorantes n’existent qu’au regard des herbes vénéneuses et se développent dans la lutte contre elles.

Interdire aux gens d’entrer en contact avec ce qui est faux, pernicieux ou ce qui nous est hostile, d’aborder l’idéalisme et la métaphysique, et de connaître les propos de Confucius, de Laotse et de Tchiang Kaï-chek serait une politique dangereuse. Elle conduirait à la régression de la pensée, à des vues unilatérales et rendrait l’homme incapable de résister aux épreuves de la vie et de réfuter les opinions adverses.
En philosophie, le matérialisme et l’idéalisme forment une unité des contraires et sont en lutte l’un contre l’autre. Il y a, par ailleurs, la dialectique et la métaphysique : elles aussi forment une unité des contraires et sont en lutte l’une contre l’autre.

Quand on traite de la philosophie, on ne peut se passer de cette paire de contraires. En Union Soviétique, on n’admet pas l’existence des paires de contraires ; on s’en tient à un seul aspect des choses, car, à ce que l’on prétend, il n’y a là-bas que des fleurs odorantes et pas d’herbes vénéneuses ; on nie l’existence de l’idéalisme et de la métaphysique dans un pays socialiste.

En fait, l’idéalisme, la métaphysique, les herbes vénéneuses existent dans n’importe quel pays. En Union soviétique, de nombreuses herbes vénéneuses apparaissent sous les couleurs de fleurs odorantes, une foule de propos bizarres se présentent sous l’enseigne du matérialisme ou du réalisme socialiste.

Nous reconnaissons publiquement la lutte entre le matérialisme et l’idéalisme, la dialectique et la métaphysique, les fleurs odorantes et les herbes vénéneuses. Cette lutte se poursuivra à jamais, et progressera d’un pas à chaque étape.

Je voudrais adresser un conseil aux camarades ici présents : si vous possédez déjà le matérialisme et la dialectique, vous devez encore compléter vos connaissances par l’étude de leurs contraires, l’idéalisme et la métaphysique.

Les œuvres de Kant et de Hegel, de Confucius et de Tchiang Kaï-chek, tous ces matériaux négatifs sont à lire. Sans connaître l’idéalisme ni la métaphysique, sans avoir lutté contre ces conceptions adverses, vos connaissances sur le matérialisme et la dialectique ne seraient pas solides. Certains membres du Parti, dont des intellectuels, ont précisément le défaut de connaître trop peu ces matériaux négatifs.

Ayant étudié quelques livres de Marx, ils se bornent à répéter ce qu’ils ont lu, et c’est bien monotone. Leurs discours, leurs articles sont donc peu convaincants. Si vous n’étudiez pas les choses négatives, vous n’arriverez pas à les réfuter.

Marx, Engels, Lénine n’agissaient pas ainsi. Ils s’appliquaient à étudier et approfondir les diverses questions de leur temps ou du passé, et invitaient les autres à faire de même. C’est à travers des études sur les doctrines de la bourgeoisie, à savoir la philosophie classique allemande, l’économie politique classique anglaise et le socialisme utopique français, et à travers des luttes menées contre elles que les trois parties constitutives du marxisme ont pu voir le jour.

Staline était moins fort. Par exemple, on considérait à son époque la philosophie classique allemande, philosophie idéaliste, comme une réaction de l’aristocratie allemande contre la Révolution française. Une telle conclusion est une négation complète de la philosophie classique allemande.

Staline a rejeté en bloc la science militaire de l’Allemagne ; selon lui, puisque les Allemands ont perdu la guerre, leur science militaire ne vaut plus rien, et par conséquent, les ouvrages de Clausewitz ne méritent plus qu’on les lise.

Il y a pas mal de métaphysique chez Staline et il a appris beaucoup de gens à la pratiquer. Dans l’Histoire du Parti Communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S., il dit que la dialectique marxiste présente quatre traits fondamentaux.

Au point a), il parle de la liaison entre les divers choses et phénomènes, comme s’ils étaient liés sans cause ni raison. Comment, alors, les choses sont-elles liées ensemble ? Par les deux aspects en contradiction. Et toute chose, tout phénomène présente deux aspects contradictoires.

Au point d), il parle des contradictions inhérentes aux choses et aux phénomènes. Mais il n’insiste que sur la lutte des contraires, sans mentionner leur unité. Conformément à l’unité des contraires, loi fondamentale de la dialectique, les deux contraires sont en lutte tout en restant unis, ils s’excluent l’un l’autre tout en étant liés l’un à l’autre et, dans des conditions données, se transforment l’un en l’autre.

Dans le Petit dictionnaire philosophique, quatrième édition, publié en Union soviétique, l’article Identité exprime le point de vue de Staline.

Il y est dit : « Les phénomènes tels que la guerre et la paix, la bourgeoisie et le prolétariat, la vie et la mort, etc., ne peuvent être identiques, car les deux aspects sont foncièrement opposés et s’excluent l’un l’autre ».

Cela veut dire que, entre ces phénomènes foncièrement opposés, il n’existe pas d’identité dans le sens marxiste du mot et qu’ils ne font que s’exclure mutuellement, sans être liés l’un à l’autre ni pouvoir se convertir l’un en l’autre dans des conditions données. Voilà une assertion fondamentalement erronée.

Selon cet article, la guerre, c’est la guerre, et la paix, c’est la paix, deux choses qui ne font que s’exclure l’une l’autre, sans liaison aucune entre elles ; la guerre ne peut se convertir en paix, pas plus que la paix en guerre.

Lénine donne cette citation de Clausewitz : « La guerre est le prolongement de la politique par d’autres moyens ». La lutte en période de paix, c’est la politique, et la guerre, c’est aussi la politique, mais avec recours à des moyens particuliers.

La guerre et la paix s’excluent l’une l’autre tout en restant liées l’une à l’autre, et se transforment dans des conditions déterminées. Si la guerre ne se prépare pas en période paix, comment peut-elle éclater brusquement ? Si la paix ne se prépare pas pendant la guerre, comment peut-elle s’établir subitement ?

Si la vie et la mort ne peuvent se convertir l’une en l’autre, dites-moi alors d’où viennent les êtres animés. Il n’y avait au début que de la matière inanimée sur la Terre, c’est seulement plus tard que sont apparus des êtres animés qui sont dérivés de la matière inanimée ou inerte. Tout être animé connaît un processus de métabolisme : naissance, croissance, reproduction et mort.

Tout au long de l’activité d’un être animé, la vie et la mort sont en lutte et se convertissent constamment l’un en l’autre.

Si la bourgeoisie et le prolétariat ne peuvent se convertir l’un en l’autre, comment expliquez-vous que, par la révolution, le prolétariat devient la classe dominante et la bourgeoisie une classe dominée (…) ?

Staline ne voyait pas la liaison entre la lutte des contraires et leur unité. Certains Soviétiques ont une méthode de pensée métaphysique, leur pensée est tellement sclérosée qu’ils ne reconnaissent pas l’unité des contraires ; pour eux, c’est comme ceci ou comme cela. Par conséquent, ils ne manquent pas de commettre des erreurs d’ordre politique (..).

Pendant une longue période, Staline a nié l’existence de contradictions entre les rapports de production et les forces productives, entre la superstructure et la base économique en régime socialiste.

C’est seulement un an avant son décès qu’il a, en termes vagues, parlé dans son livre Les problèmes économiques du socialisme en U.R.S.S. de la contradiction entre les rapports de production et les forces productives en régime socialiste. Des problèmes surgiront, dit-il, si la politique est erronée et que l’action régulatrice joue mal à propos.

Toutefois, il n’a toujours pas présenté comme un problème global les contradictions entre les rapports de production et les forces productives, entre la superstructure et la base économique en régime socialiste, il ne s’est toujours pas rendu compte que ces contradictions constituent les contradictions fondamentales qui font progresser la société socialiste. Il croyait que sont Etat était solide.

Quant à nous, nous ne devons pas penser que notre Etat est solide. Il l’est tout en ne l’étant pas.
La dialectique estime que le régime socialiste, en tant que phénomène historique, disparaîtra un jour, tout comme l’homme doit mourir, et que le régime communiste en sera la négation.

Comment peut-on considérer comme marxiste l’assertion selon laquelle le régime socialiste, ainsi que les rapports de production et la superstructure du socialisme, ne disparaîtront pas ? Ne serait-ce pas là un dogme religieux, la théologie qui professe l’éternité de Dieu ? ».

Comme on le comprend, les erreurs dans la politique du Parti ont amené un espace où a pu se développer le révisionnisme.

Ce révisionnisme, avec Khroutchev, a pris le pouvoir à la mort de Staline, et a rétabli le capitalisme.
Traiter de la restauration du capitalisme en U.R.S.S. prendrait ici trop de place, aussi y aura-t-il un document spécifique à ce sujet, également consacré à la restauration en Chine populaire dans les années 1970.

Ce qui compte ici, c’est de comprendre le sens de l’expérience du Parti bolchévik, le formidable travail théorique et pratique, la conquête d’une ligne politique correcte, et l’avancée dans le processus révolutionnaire.